L’administration Trump prévoit de durcir encore le contrôle des voyageurs dispensés de visa, en rendant obligatoire la communication de cinq années d’activité sur les réseaux sociaux, ainsi que de nouveaux éléments d’état civil et de contact, pour toute demande d’ESTA.
Selon un avis publié le 10 décembre au Federal Register, les autorités américaines veulent faire des identifiants de réseaux sociaux un « élément obligatoire de données » pour toute demande d’autorisation de voyage électronique (ESTA) dans le cadre du programme d’exemption de visa. Concrètement, les voyageurs devront déclarer l’ensemble des comptes utilisés au cours des cinq dernières années sur les principales plateformes sociales avant de pouvoir embarquer vers les Etats-Unis. Cela représente une évolution lourde de conséquences pour les passagers français et, plus largement, pour le trafic aérien transatlantique déjà fragilisé par un climat politique jugé dissuasif.
Car cette réforme vise les ressortissants des 42 pays bénéficiant du Visa Waiver Program, dont la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Australie, Israël, le Japon ou la Corée du Sud, qui peuvent actuellement séjourner jusqu’à 90 jours sans visa avec un simple ESTA obtenu en ligne. Le texte prévoit une période de commentaires publics de 60 jours, mais sauf recours judiciaire ou revirement politique, les nouvelles exigences pourraient s’appliquer dès la prochaine saison touristique.
Un formulaire ESTA profondément remanié
Au-delà des réseaux sociaux, le dispositif prévoit une collecte beaucoup plus large de données personnelles, transformant le formulaire ESTA (Electronic System for Travel Authorization) en véritable dossier de profilage numérique. Les autorités douanières (CBP) souhaitent notamment recueillir les numéros de téléphone utilisés au cours des cinq dernières années, ainsi que toutes les adresses électroniques employées sur les dix dernières années.
Les demandeurs devront en outre renseigner des informations détaillées sur leurs proches, notamment noms, dates et lieux de naissance, numéros de téléphone et adresses de résidence des membres de la famille. Le projet évoque également l’ajout de « données à forte valeur » comme des métadonnées associées aux photos transmises, ainsi que le recours accru à la biométrie (selfies pris via une application mobile, empreintes, voire iris et ADN dans certains scénarios).
Sécurité nationale et méfiance numérique
Officiellement, la démarche s’inscrit dans la mise en œuvre d’un décret présidentiel consacré à la protection du territoire face aux menaces terroristes et aux risques pour la sécurité publique. L’examen systématique de l’historique numérique des voyageurs est présenté comme un outil de détection précoce des signaux de radicalisation ou de comportements suspects, dans la continuité d’initiatives déjà testées sur certains profils de visas étudiants.
Depuis 2016, le formulaire ESTA comportait déjà une question optionnelle sur les réseaux sociaux, mais l’absence de réponse n’emportait « aucune conséquence négative ». La nouveauté tient au caractère désormais obligatoire de ces informations, qui transforme une zone grise en exigence formelle sous peine de se voir refuser l’autorisation de monter à bord.
Un impact direct sur les passagers aériens
Pour les compagnies aériennes, cette évolution renforce l’importance cruciale du contrôle documentaire en amont de l’embarquement, sous peine de se voir refuser des passagers à l’arrivée ou de devoir les réacheminer. Les transporteurs opérant entre l’Europe et les Etats-Unis pourraient être contraints d’investir davantage dans l’accompagnement des clients lors des démarches ESTA, afin de limiter les cas de refus de voyage de dernière minute.
Du point de vue des voyageurs, cette complexification administrative intervient alors que les flux transatlantiques n’ont pas encore pleinement retrouvé leur dynamique d’avant-crise sanitaire, et que la concurrence d’autres destinations long-courriers se renforce. La perspective de devoir livrer cinq ans de vie numérique, ainsi que le détail de son réseau familial, pourrait dissuader une partie des touristes occasionnels ou des voyageurs d’affaires sensibles à la protection de leurs données. De nombreuses associations de défense des libertés civiles dénoncent dans cette proposition une « surveillance généralisée » des voyageurs, estimant que l’examen systématique des réseaux sociaux porte atteinte à la vie privée et risque d’aboutir à des décisions arbitraires.
La profession touristique américaine alerte déjà sur un recul attendu des arrivées internationales, dans un contexte mêlant durcissement des règles d’entrée, tensions politiques et perception dégradée de l’accueil réservé aux étrangers. Selon des projections relayées par l’U.S. Travel Association, les visites de touristes étrangers devraient reculer d’environ 6,3% en 2025 par rapport à 2024, avec un impact direct sur les recettes et l’emploi dans l’hôtellerie, la restauration et le transport aérien.
Cette tendance inquiète particulièrement à l’approche de la Coupe du monde de football 2026, dont une partie des matches se tiendra aux Etats-Unis et qui devait initialement servir de levier de relance pour l’aérien et le tourisme. Pour les compagnies européennes, qui avaient calibré une montée en puissance de leurs capacités vers les hubs américains à l’horizon 2026, le risque est désormais de se retrouver face à une demande moins dynamique que prévu.
Conseils pratiques pour les voyageurs
Pour les passagers français qui préparent un vol vers les Etats-Unis, plusieurs réflexes s’imposent désormais en matière de préparation du voyage. Il est recommandé de déposer sa demande d’ESTA bien en amont du départ, de recenser les comptes de réseaux sociaux effectivement utilisés ces dernières années, et de s’assurer que les informations fournies (adresses, numéros de téléphone, état civil) correspondent à celles figurant sur les documents officiels.
Les voyageurs doivent également garder à l’esprit qu’une autorisation ESTA, même accordée, ne garantit pas automatiquement l’accès au territoire, la décision finale appartenant toujours aux agents à la frontière. En cas d’hésitation ou de situation complexe (changements fréquents de numéro, historique familial sensible, activité militante très visible en ligne), le recours à un conseil spécialisé en mobilité internationale peut permettre d’anticiper les points de vigilance.

MoMoDeRabat a commenté :
13 décembre 2025 - 16 h 56 min
L’historique de certains anti américains sur air journal pourrait intéresser également l’administration Trump.
bigmat75 a commenté :
13 décembre 2025 - 16 h 59 min
En réélisant facilement Trump, l’Amérique a fait un énorme doigt d’honneur au reste du monde. Et on le sent chaque jour davantage.
Face à cela, les seules réponses qui vaillent sont : mépris et boycott.