La privatisation partielle des gestionnaires des aéroports de Nice et Lyon a attiré au moins onze offres fermes de la part de sept consortiums. Le nom des repreneurs sera dévoilé en aout, mais la présence de candidats étrangers et en particulier du conglomérat turc Limak a déclenché les foudres d’élus de l’opposition. L’Agence des Participations de l’Etat (APE), qui gère le processus de vente des 60% détenus par l’Etat dans les sociétés gestionnaires des aéroports de Nice-Côte d’Azur et Lyon-Saint Exupéry, n’a pas publié le 4 juillet 2016 la liste des candidats à la reprise, alors que la clôture du dépôt des offres fermes était fixée à midi. Selon les Echos, cinq groupes se sont porté candidats à la reprise des deux plateformes : Vinci Airports (associé à la Caisse des Dépôts et à l'assureur Predica du Crédit agricole), le groupe d'investissement français Meridiam (avec le groupe espagnol Ferrovial, propriétaire de Londres-Heathrow), le fonds d'investissement Ardian Infrastructures (Londres-Luton, allié au gestionnaire de Singapour-Changi), le groupe italien Altantia (Rome-Fiumicino) et le groupe turc Limak (Istanbul-Sabiha Gökcen, Pristina aux côtés du gestionnaire de Lyon, et surtout le futur aéroport d’Istanbul). L’Australien Macquarie (avec FPP, holding familial de Peugeot) et Allianz (avec le fonds américain GIP) sont également candidats à Nice. D’autres sources parlent d’onze offres fermes et non douze, deux candidats ayant renoncé à Lyon : le canton de Genève allié à Cube et Limak, et l’aéroport de Zurich allié à un fonds de pensions canadien. Le montant des offres se situeraient entre 750 et 900 millions d’euros pour Nice, et entre 500 et 800 millions d’euros pour Lyon, l’Etat espérant récupérer environ 1,6 milliard d’euros pour financer des entreprises publiques. Le ministère de l’Economie n’a fait aucun commentaire sur ces informations. Il faudra attendre le mois prochain pour connaître le nom du ou des repreneurs des sociétés gérant les deux principaux aéroports de province, mais deux élus d’opposition dans les régions concernées ont fait connaître leurs réserves contre des investisseurs étrangers. Dès le mois dernier, le maire de Nice Christian Estrosi jugeait « inadmissible de permettre à une puissance étrangère de s'emparer d'un tel outil stratégique de la Côte d'Azur alors que nous sommes en état d'urgence, en état de guerre même ». Et hier, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez expliquait dans Le Progrès qu’il n’est « pas question de céder Saint-Exupéry à un groupe étranger (…). Notre aéroport est un outil de souveraineté ». Quant au groupe turc Limak dont l’activité va du ciment au tourisme en passant par les aéroports, il est très riche et donc susceptible de l’emporter. Des accusations de corruption l’entourent, son fondateur étant visé par une enquête depuis 2013 (et depuis abandonnée) mais étant aussi connu comme proche du Président Erdogan. Reste à savoir si ces accusations sont l’objet du lobbysme de concurrents moins puissants. Et si l’Etat n’a pas validé sa candidature pour faire monter les enchères : après tout, il est actionnaire majoritaire d’ADP, lui-même actionnaire de TAV Airports dont un des aéroports gérés est Istanbul-Atatürk, et ne peut ignorer ce qui se passe en Turquie… ADP avait renoncé à présenter des offres, après avoir étudié le cas de Nice. Rappelons qu’après Toulouse-Blagnac, l’Etat vend les 60% de parts qu’il détient dans les sociétés gérant Nice et Lyon, le reste du capital étant réparti entre les acteurs institutionnels locaux. Les infrastructures resteront propriété de l’Etat, qui conserve un droit de regard sur les taxes d’aéroport, tandis que l’ouverture de nouvelles lignes aériennes sera toujours du ressort de la DGAC.