Le recrutement par la compagnie aérienne Air France de 159 pilotes d’ici l’été prochain, pour son activité moyen-courrier et celle de sa filiale low cost Transavia France, implique pour chacun une qualification de type – et donc plus de temps passé par les pilotes instructeurs à leur formation, entrainant un manque dans les opérations qui ne peut être comblé que par des embauches. Comme annoncé début octobre, la compagnie nationale française recrute 102 pilotes pour ses Airbus A320, et 57 pour les Boeing 737-800 de sa filiale low cost Transavia France, tous au niveau de copilote ; les premières recrues entreront en service d’ici la fin du mois. Lors d’un entretien publié par L’Usine Nouvelle le 17 novembre 2016, la secrétaire générale du Syndicat National des Pilotes de Ligne (SNPL) Véronique Damon revient sur ces premières embauches de pilotes depuis huit ans chez Air France. Rappelant que leur nombre est passé de 4375 pilotes en 2008 à 3555 en 2015 « pour une activité à peu près équivalente », elle estime que le non-remplacement des départs en retraite, justifié pour absorber le sureffectif de pilotes pendant la crise, a eu l’effet escompté. Mais aujourd’hui, ce nombre de pilotes « devient bloquant » : selon la syndicaliste qui est également pilote de Triple Sept, tous les pilotes ont reçu l’été dernier « un appel ou un SMS leur demandant de prendre un vol pendant leurs congés ». Les réponses favorables ont permis à Air France de retarder la reprise des embauches, mais elle ne tiendra pas longtemps dans ces conditions : selon Véronique Darmon, la direction admet désormais qu’elle a « besoin de pilote pour faire voler ses avions. Nous aurions pu passer l’été 2017 de manière très tendue, mais pas 2018 ». Avant de conclure : « il valait mieux reprendre dès cette année, plutôt que d’embaucher le double de personnes l’année prochaine ». Ce processus de recrutement implique l’acquisition par les nouveaux pilotes d’une QT (qualification de type), et donc un temps de formation – par des pilotes-instructeurs qui du coup ne pourront plus voler aussi longtemps sur les lignes de la compagnie de l’alliance SkyTeam. Au lieu de voler 80 heures pour le long-courrier ou 65 heures pour le moyen-courrier dans le mois, « un pilote instructeur n’en fera que la moitié ou un quart et consacrera le reste de son temps de travail aux formations », précise Véronique Damon. Or ces pilotes-instructeurs ne sont plus que 365, contre 569 en 2008 : Air France va donc détacher 150 pilotes supplémentaires pour former les nouveaux arrivants, ce qui « implique de recruter de nouveaux pilotes. Et au final, la reprise des embauches va créer de nouvelles embauches », résume la dirigeante du SNPL. air-journal_Air France CDG pilote OlympiqueLe mois dernier, l’article des Echos soulignait d’une part que ce recrutement est devenu possible grâce à la baisse du prix du pétrole qui a entrainé une amélioration de la situation financière d’Air France, alors que celle-ci estimait en 2015 le sureffectif des pilotes à 300 postes (mais aussi 900 PNC et 1700 employés au sol) pour justifier l’annonce d’un plan d’attrition aujourd’hui abandonné. En outre, la compagnie fait désormais plutôt face à un sous-effectif chez les pilotes de Boeing 777, l’un d’eux calculant que « les 68 qualifications prévues sur 777 ne représenteront en fait que 16 copilotes supplémentaires, soit 1,5% d'effectif supplémentaire ». Rappelons que ce plan d’embauches sur monocouloirs est volontairement limité pour ne pas « susciter un appel d'air trop important » chez la filiale régionale HOP! Air France, déjà confrontée au manque de pilotes (ceux en liste d’attente sont prioritaires pour un tiers des nouvelles embauches) ; plus de 30 postes supplémentaires auraient pu être recrutés sans ce problème créé par une convention de 2014. Le deuxième tiers est représenté par des pilotes en activité dans d’autres compagnies : easyJet, Lufthansa, Qatar Airways, Cathay Pacific et Emirates Airlines étaient mentionnée pour ceux ayant débuté leur formation le mois dernier. Enfin le troisième tiers sort de l’Ecole nationale d’aviation civile (ENAC) : selon le directeur générale de cette dernière Philippe Crébassa, interrogé par L’Usine Nouvelle, « dans les douze prochains mois, tous les EPL (élève pilote de ligne) sortis de l’ENAC depuis 2014 seront embauchés ».