Le gouvernement malaisien a publié hier le rapport final sur la disparition du vol MH370 de Malaysia Airlines en mars 2014 avec 239 personnes à bord, sans apporter de nouvelles informations ni privilégier un scénario plus qu’un autre – panne, détournement ou suicide.

D’abord présenté aux familles des victimes puis au public le 30 juillet 2018, le rapport (495 pages en anglais, disponible ici) revient en détail sur ce que l’on sait du parcours du Boeing 777-200ER immatriculé 9M-MRO de la compagnie aérienne malaisienne, disparu le 8 mars 2014 lors d’un vol entre Kuala Lumpur et l’aéroport de Pékin avec 227 passagers et 12 membres d’équipage à son bord, et sur les recherches qui se sont interrompues en janvier 2017. Mais aucune « véritable cause » n’a pu être identifiée par les enquêteurs. Seule certitude, l’appareil a dévié de sa trajectoire vers le nord et volé au-dessus de la péninsule malaisienne en direction du sud de l’Océan indien. Ces changements sont « difficiles à attribuer uniquement à des problèmes de système anormaux », dit le rapport, mais savoir si l’avion était piloté par quelqu’un d’autre que les pilotes « n’a pas pu être établi » ; des essais ultérieurs de simulateur de vol « ont établi que le changement de direction a probablement été effectué alors que l’avion était sous contrôle manuel et non sous pilote automatique ».

Toujours selon le rapport, la piste du suicide d’un des deux pilotes semble difficile à croire : rien n’indique que le commandant de bord Zaharie Ahmad Shah ou le copilote ont éprouvé des changements ou des difficultés dans leurs relations personnelles, ou qu’il y a eu des conflits ou des problèmes entre eux. Les deux « détenaient des licences d’aviateur et une certification médicale valides », indique le rapport, tandis que « tous les membres de l’équipage, en cockpit et en cabine, ont été certifiés aptes à voler et se trouvaient dans les limites de temps de service au moment du vol avec des repos antérieurs normaux ». Il n’y avait en outre « pas de stress financier ou d’insolvabilité imminente, de couverture d’assurance récente ou additionnelle achetée, ni de changements de comportement récents pour l’équipage ». Les communications radio menées par le commandant de bord et le copilote avec le contrôle aérien étaient « conformes à la procédure de routine », et aucune trace d’anxiété ou de stress n’a été détectée lors de ces communications.

Le rapport final écarte aussi la piste d’un problème de marchandise dangereuse dans la cargaison : les 221 kg de batteries au lithium-ion et les 4566 kg de mangoustans étaient « emballés et chargés conformément aux procédures d’exploitation standard », et des charges similaires ont été transportés sur les vols de Malaysia Airlines avant et après la disparition du vol MH370. « Des tests approfondis menés sur les mangoustans remplis d’extraits de mousse et de jus de mangoustans imbibés d’eau au contact des batteries au lithium-ion ont révélé que cela ne pouvait être dangereux que s’ils étaient exposés à une condition extrême et sur une longue période », précise le rapport, ce qui rend la chose « très improbable à bord du MH370 qui avait une durée de vol relativement courte et était dans des conditions contrôlées ».

Vol MH370 : rien de neuf dans le rapport final 1 Air JournalLa thèse d’une panne est elle aussi écartée au vu du virage à 180 degrés, et faute d’information technique et de conversation avec le cockpit. La possibilité d’un détournement par un ou des passagers « ne peut pas être exclue » mais est par définition impossible à prouver, aucune revendication n’ayant été reçue par les médias, la compagnie aérienne ou les autorités.

Le rapport final revient aussi sur les recherches menées pendant trois ans, quelque 120.000 km² de l’Océan Indien au large de l’Australie ayant été passés au crible sans trouver trace du fuselage de l’avion. Les différentes pièces retrouvées, en particulier le flaperon découvert à La Réunion et identifié formellement comme provenant du 9M-MRO, n’ont pu que prouver que l’appareil avait été au moins en partie détruit ; les études sur les courants n’ont pas permis de localiser l’épave.

Les familles des victimes ont sans surprise accueilli avec colère ce rapport qui n’apporte rien sur le sort de leurs proches. Et conserve quelques zones d’ombre, en particulier sur les données radar détaillées qui seraient incompatibles avec la taille et la maniabilité d’un 777, mais n’ont jamais été fournies ; les militaires de la région ne participaient bien sûr pas à l’enquête. Kok Soo Chon, responsable de l’enquête de sécurité MH370, a d’autre part souligné dans sa conférence de presse que plusieurs protocoles n’avaient pas été respectés par le contrôle aérien en Malaisie et au Vietnam, 20 minutes étant perdues avant que la disparition du vol MH370 soit découverte. Le prochain premier ministre de Malaisie, Anwar Ibrahim, qui devrait prendre les rênes du gouvernement d’ici deux ans, a déclaré dans Le Monde qu’il irait, lui, jusqu’au bout de cette enquête : « il y va de notre sécurité nationale de savoir exactement ce qui s’est passé avec cet avion ».

L’équipe d’enquête comprenait 19 Malaisiens et sept représentants accrédités du NTSB américain, de l’AAIB britannique, de l’ATSB australien, du BEA français, de la CAAC chinoise, du NTSC indonésien et du TSIB singapourien.

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