L’ampleur du carnet de commandes de la compagnie aérienne Emirates, qui comprend entre autres 79 A380 et 49 B777, en fait un client très écouté des constructeurs aéronautiques. Boeing est le dernier en date à avoir reçu les "conseils"  de la compagnie de Dubaï, en particulier sur le futur de son 777. Il y a dix ans, Emirates avait déjà usé de tout son pouvoir pour influencer les caractéristiques de ce qui allait devenir le 777-300ER. Résultat, le 777-300ER qui vole aujourd'hui est la version se vendant le mieux dans la famille 777 – dont elle est par ailleurs le plus gros acheteur. Le PDG d'Emirates Tim Clark entend donc prodiguer de nouveau ses "conseils", alors que Boeing décidera d'ici la fin de l'année ce que sera le successeur du 777, soit une évolution soit un avion entièrement nouveau, et qu'Airbus livrera bientôt son concurrent le plus sérieux avec l'A350-1000. La compagnie compte n'utiliser que trois appareils sur ses routes les plus longues, comme celle reliant Dubaï à la côte ouest des Etats-Unis: par ordre de taille, l'A350, le B777 et l'A380, qui transporteront respectivement 320, 354 et 489 passagers (dans la configuration trois classes luxueuses qu'elle a adoptée). Mais le 777 doit retirer 20 sièges pour pouvoir voler jusqu'à San Francisco sans escale. Les désirs d'Emirates sont donc simples: un avion de la même taille que le 777-300ER, mais qui pourrait voler plus loin, de plusieurs centaines de kilomètres, à pleine charge. Si Boeing est capable de fournir ces caractéristiques avec une nouvelle version du 777, tant mieux. Mais Emirates semble plutôt pencher vers un biréacteur complètement neuf. Emirates mettra ses premiers 777 à la retraite en 2017, et Tim Clark juge qu'il lui faudra 70 appareils de cette taille dans les cinq années suivantes. Son conseil à Boeing: développer dès maintenant une nouvelle famille de la même taille que le 777-300ER, avec une version plus petite et une version plus grande. Et Boeing dans tout ça? La prudence est de règle. D'abord parce que le pari industriel de plusieurs dizaines de milliards de dollars pour créer un nouvel avion pourrait capoter si les commandes ne sont pas au rendez-vous, Emirates pouvant "tomber" comme n'importe quelle autre compagnie. D'autre part, la compagnie de Dubaï est très axée sur les vols très longs avec beaucoup de passagers, qui ne sont pas représentatifs du marché global des avions de la taille du 777 ou de l'A350. Mais comme il faut plaire aux clients, Boeing "écoute" et "prendra en compte" les désirs d'Emirates au moment de la décision finale.