Airbus va augmenter le rayon d’action de la famille A220, les ex-CSeries gagnant environ 450 nm. L’A350-1000 est confirmé comme « navire amiral » à la place de l’A380 dans le portefeuille de l’avionneur, dont le président Guillaume Faury a lancé un plaidoyer pour l’Europe.

Le constructeur européen a annoncé le 21 mai 2019 une « optimisation majeure des performances » de la famille A220 à partir du deuxième semestre de 2020, les deux modèles devant bénéficier d’une MTOW (masse maximale au décollage) augmentée de 2,268 tonnes : l’A220-100 passera ainsi de 60,2 à 63,1 tonnes, et l’A220-300 de 67,6 à 69,9 tonnes. Les deux monocouloirs d’origine canadienne y gagneront au passage 450 milles nautiques d’autonomie, portée à 3400 nm pour l’A220-100 et à 3350 nm pour l’A220-300. Cette augmentation de la performance est obtenue « en prenant en compte les marges des structures et des systèmes existants ainsi que la capacité de volume de carburant existante », précise Airbus. Cela permettra aux compagnies aériennes d’exploiter « de nouvelles routes auparavant impossibles, reliant les principales villes d’Europe occidentale au Moyen-Orient ou de l’Asie du Sud-est à l’Australie ».

 « Dans la pure tradition Airbus, nous améliorons constamment nos produits », a déclaré dans un communiqué Christian Scherer, directeur commercial d’Airbus ; « cette nouvelle MTOW permettra aux opérateurs d’atteindre des marchés qui ne peuvent plus être desservis par d’autres types d’aéronefs à couloir unique ». Depuis sa mise en service il y a près de trois ans par Bombardier, le désormais nommé A220 « a déjà prouvé qu’il atteignait ou dépassait ses objectifs de performance initiaux, apportant plus de flexibilité et de potentiel de revenus aux clients », a souligné Rob Dewar, responsable de l’ingénierie et de la clientèle A220. « Aujourd’hui, Airbus renforce sa confiance dans la plate-forme A220 et renforce encore ses capacités pour répondre aux futures exigences du marché ».

L’Airbus A220 associe « une aérodynamique à la pointe de la technologie, des matériaux de pointe et les turboréacteurs de la dernière génération PW1500G de Pratt & Whitney pour offrir une consommation de carburant par siège réduite d’au moins 20% par rapport aux avions de la génération précédente ». Avec un carnet de commandes de plus de 530 avions à ce jour, l’A220 a selon Airbus « toutes les références pour conquérir la part du lion du marché des avions de 100 à 150 places, estimé à 7000 avions au cours des 20 prochaines années ».

Airbus : A220, avenir et plaidoyer pour l’Europe 1 Air Journal

Lors des Innovation Days qui ont débuté hier à Toulouse, le directeur commercial d’Airbus Christian Scherer est aussi revenu sur les autres monocouloirs, qualifiant l’A321LR de celui « au plus long rayon d’action pour le moment » ; de qui alimenter la rumeur d’un lancement de la version XLR au prochain Salon du Bourget. Concernant le rival Boeing 737 MAX, le dirigeant a dit craindre que le grand public « perde en partie la confiance en notre secteur en raison des problèmes de certification », la FAA devant « probablement devenir plus stricte et nous contrôler encore et encore » pour le directeur des opérations Michael Schöllhorn. Christian Scherer a réaffirmé en outre que le futur NMA « n’apportera rien de plus face au couple A321neo/A330neo » : il n’est « pas sûr que cela vaille la peine de dépenser plus de 10 milliards de dollars juste pour ce type d’avion (…), nos programmes sont si matures qu’ils permettent à Airbus une souplesse dans les prix pour s’adapter à ce segment de marché ». Et d’ajouter : « j’espère que Boeing fera l’erreur de le lancer »…

Airbus : A220, avenir et plaidoyer pour l’Europe 2 Air JournalSi le 777X a été juste qualifié de « Hummer remotorisé », le programme A350XWB a également été commenté par Christian Scherer, pour qui l’A350-1000 « est désormais l’appareil phare » d’Airbus, et « le plus gros proposer aux clients » – éloignant un peu plus, si besoin était, la possibilité d’une renaissance de l’A380 dont la production s’arrêtera en 2021 (avec un total de 274 commandes fermes). L’A350, dont la cadence de production sera maintenue à dix appareils par mois, sera aussi « le seul avion ultra-long-courrier (ULR) qu’il construira », le directeur commercial expliquant au passage que l’avion peut « très confortablement accueillir des rangées de dix sièges » – un appel du pied aux low cost long-courrier (French bee et Evelop! sont déjà choisi cet aménagement). Une version « à capacité supplémentaire » de l’A350-900ULR sera bien proposée à Qantas pour son projet Sunrise de vols directs entre Sydney et Londres (qui sera la route la plus longue au monde avec 21 heures de vol).

On retiendra enfin de la journée de mardi les vues du patron du groupe Airbus Guillaume Faury sur l’idée d’une taxe européenne sur le carburant d’aviation : « Nous pensons pas que c’est une bonne idée. Il y a déjà beaucoup de taxes sur le secteur. Il faut veiller à préserver des conditions de concurrence équitable… Ce qui ne veut pas dire que nous ne sommes pas en faveur de la décarbonisation du secteur. Mais mieux vaut que l’argent (des compagnies) soit investi dans les nouvelles technos, dans les biocarburants… », a-t-il déclaré selon Les Echos. Et en pleine campagne pour les élections européennes, le Président Exécutif d’Airbus a publié une lettre ouverte rappelant que « sans l’Europe, qui aurait parié sur Airbus ? » :

« En 1969, le secteur aérospatial européen est au point mort. Tous les pays sont en concurrence et se situent loin derrière les Américains, qui contrôlent plus de 80% du marché des avions commerciaux. Le 29 mai 1969, les ministres allemand et français adoptent une nouvelle approche : un partenariat entre pays européens, auxquels se rallieront par la suite l’Espagne et le Royaume-Uni, pour développer le premier avion Airbus, l’A300. Peu de gens à l’époque auraient parié sur la réussite de cette entreprise paneuropéenne. Et pourtant ! De cette vision a émergé un champion mondial de l’aéronautique et de l’espace ».

« Alors que les élections au Parlement européen approchent, nous ne devons pas oublier que l’avenir économique de l’Europe ne pourra être garanti que par une Union Européenne confiante et forte, face  notamment à la montée des nationalismes, à une croissance fragile et aux tensions commerciales dans le monde. C’est aussi la leçon du passé et du présent d’Airbus qui célèbre son 50e anniversaire, également ce mois-ci ».

« Airbus a 50 ans et notre histoire est une victoire de l’intégration européenne. En cinq décennies, nous avons réuni des entreprises d’aviation civile et de défense de l’ensemble du continent, en réduisant les couts et les duplications. Aujourd’hui, nous produisons la moitié des avions commerciaux du monde et prospérons dans les domaines des hélicoptères, de la défense et de l’espace. Nous employons 130 000 personnes hautement qualifiées dans le monde et sommes un puissant moteur de productivité, d’exportations et d’innovation pour l’Europe ».

« Airbus s’est construit autour de coopérations politiques et face à une rivalité transatlantique dont les batailles commerciales ont souvent fait la une des journaux. L’excellence de plusieurs générations d’ingénieurs a contribué à rendre le transport aérien plus sûr, plus efficace et accessible à des centaines de millions de personnes tout autour du globe. Bon nombre d’innovations marquantes ont propulsé la croissance d’Airbus. Depuis 2014, nos avions sont construits avec des matériaux composites légers et avancés et ont permis de réduire de près de 25% les émissions de CO2 sur les vols long-courriers. Notre capacité à faire circuler librement nos pièces d’avion, ainsi que notre personnel et notre technologie, partout en Europe, est l’une des clés de notre succès ».

« Mais, quelle sera la suite ?  L’industrie aérospatiale est à la veille d’une révolution technologique sans précédent. La technologie numérique, le vol autonome, l’intelligence artificielle et l’électrification vont transformer la façon dont les avions sont conçus, fabriqués, pilotés et entretenus. On l’appelle déjà le «nouvel âge d’or» de l’aérospatiale et il annonce une concurrence encore plus forte avec l’émergence de nouvelles puissances dans le secteur ».

« L’Europe dispose de tous les atouts pour pouvoir diriger cette prochaine révolution en matière d’innovation et de transition vers une industrie durable et un transport aérien décarboné. Les programmes d’innovation de l’Union européenne sont idéalement placés pour développer les technologies de rupture qui permettront à l’Europe de réaffirmer son leadership dans le secteur aérospatial pour les décennies à venir ».

« Pour prospérer dans ce monde en mutation, Airbus a plus que jamais besoin du soutien financier et politique de l’Union Européenne, pour assurer par exemple  le développement de la prochaine génération de satellites et d’avions de combat en Europe. Face au protectionnisme et à la fragmentation politique, l’UE  doit continuer à défendre le libre-échange en Europe et au-delà. L’importance stratégique de l’industrie aéronautique et spatiale, secteur largement globalisé, nécessite que l’Europe continue à parler d’une voix forte et unie ».

« Nous sommes les héritiers des fondateurs d’Airbus qui se sont unis il y a 50 ans avec une vision ambitieuse d’innovation et de partenariat international – avec l’énergie de la concrétiser. A nous d’écrire maintenant la prochaine page de l’histoire européenne ».

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