En grandes difficultés, la compagnie aérienne Aigle Azur a annoncé hier le départ de son président Franz Yvelin, remplacé par le dirigeant de l’actionnaire Lu Azur, et la démission d’autres dirigeants dans ce qui ressemble fort à un coup d’état

Le Comité social et économique (CSE) extraordinaire du 26 août 2019 a entrainé un changement de gouvernance chez la compagnie française spécialisée dans la desserte de l’Algérie : un communiqué aux employés publié par Le Figaro annonce que Gérard Houa « assure désormais la présidence d’Aigle Azur » et Philippe Bohn « la fonction de directeur général ». Le premier détient l’actionnaire Lu Azur (19% du capital d’Aigle Azur), tandis que le second est entre autres le cofondateur et jusqu’en avril dernier le directeur général d’Air Sénégal.

Exit donc le président Frantz Yvelin, arrivé il y a deux ans et auquel les nouveaux dirigeants reprochent « les errements stratégiques des deux dernières années » ; Aigle Azur « pour continuer d’exister, exige des actions vigoureuses et immédiates », alors que les actionnaires auraient été « longtemps tenus dans l’ignorance » de la situation réelle, alors que la direction « annonçait l’objectif d’un résultat à l’équilibre, voire légèrement excédentaire ». Des actionnaires accusés par Frantz Yvelin de l’avoir « abandonné », quand il a annonçait il y a quinze jours la vente probable à la low cost Vueling des activités d’Aigle Azur au Portugal, les principaux (HNA avec 49% et le fondateur d’Azul David Neeleman avec 32%) rencontrant leurs propres difficultés et refusant de réinvestir dans la compagnie aérienne.

Selon le communiqué de Gérard Houa et Philippe Bohn, toutes les solutions explorées jusqu’à présent « ont consisté – au grand détriment des salariés – à brader ces actifs dans une démarche de court terme, sans vision pour l’avenir et sans le réel souci de sauver l’entreprise », dont près de trois quarts des pertes (50 millions d’euros en deux ans) « sont imputables à l’exploitation de lignes moyen-courriers en Europe ». Depuis l’arrivée de Frantz Yvelin, Aigle Azur a ouvert des lignes entre sa base à Paris-Orly et les aéroports de Berlin et Milan, aux fréquences désormais réduites, celle reliant Lyon à Nantes étant fermée depuis janvier après moins de trois mois d’existence (elle a aussi suspendu fin juillet pour huit semaines son Marseille – Dakar). Et depuis le début de l’année, elle a lancé des lignes reliant Orly à Kiev et Marseille à Moscou, et signé un partage de codes avec ASL Airlines France sur l’Algérie.

Rappelons que l’aventure d’Aigle Azur sur le long-courrier fera aussi les frais des problèmes financiers : les vols vers Sao Paulo-Viracopos, inaugurée en juillet 2018, ne sont plus proposés à partir du 10 septembre. Si cela se confirme, ce sera la fin de son activité long-courrier hors Afrique (Bamako), alors qu’elle espérait encore au printemps relancer des vols vers Pékin (une ligne suspendue à la fin de l’hiver dernier, après six mois d’activité)… Le sort des vols vers Beyrouth n’a pas été annoncé.

La nouvelle gouvernance, qui selon Le Figaro n’a pas reçu l’aval des actionnaires, n’a pas présenté hier de plan pour redresser Aigle Azur, dont plus de la moitié du chiffre d’affaires est fait sur l’Algérie. Les 1,88 millions de passagers transportés l’année dernière et les 1150 employés peuvent légitimement s’inquiéter…

Aigle Azur perd sa tête 1 Air Journal

©Aigle Azur