La compagnie aérienne low cost Ryanair évoque de nouveaux délais pour ses futurs Boeing 737 MAX, en raison d’un problème de design, tandis que LOT Polish Airlines met sur le compte de l’immobilisation au sol des monocouloirs remotorisés un ralentissement de ses plans de croissance. La FAA ne partagera plus avec le constructeur l’émission de certificats de vol, tandis que la société de leasing SMBC estime que l’impact de la crise pourrait se faire sentir jusqu’en 2021.

Ryanair a déclaré dans un courrier interne aux pilotes vu par The Air Current ne plus s’attendre à disposer l’été prochain que dix 737 MAX 200 « au mieux », attribuant les nouveaux retards de livraison à un « problème de design » sur la version haute densité du MAX 8. Le directeur Neal McMahon évoque sans le détailler un problème avec « la deuxième porte de secours au-dessus des ailes », qui reporterait les premières livraisons possibles à avril ou mai 2020. La low cost espérait fin octobre disposer de vingt 737 MAX pour la haute saison estivale (contre 58 espérés initialement), mais en juillet dernier imaginait déjà une année complète sans monocouloir remotorisé. Cela pourrait entrainer de nouvelles fermetures de bases, et une réduction de capacité ayant des conséquences sur l’emploi : le dirigeant souligne que la compagnie aérienne « essaie de s’assurer » qu’elle disposera d’au moins cinquante appareils en 2021, afin de retrouver des niveaux de recrutement de pilotes « normaux ».

Ryanair a commandé 135 Boeing 737 MAX 8-200, version densifiée du MAX 8 qui accueillera 197 passagers (contre 189 dans ses 737-800 actuels). La première livraison était prévue en avril 2019, mais les livraisons sont interrompues et tous les MAX mis en service sont cloués au sol depuis mars et le deuxième crash en cinq mois d’un MAX 8 (346 victimes au total chez Lion Air et Ethiopian Airlines). Boeing a souligné que la certification du MAX 200 dépend de celle de la famille. 

Michael O’Leary, CEO de Ryanair Holdings qui chapeaute la spécialiste irlandaise du vol pas cher, Ryanair UK, Lauda en Autriche et Buzz en Pologne, expliquait d’autre part dans The Irish Independent ne pas être pressé pour commander de nouveaux avions : il peut attendre que les prix baissent, alors qu’actuellement « le MAX est cloué au sol, Airbus augmente ses prix, et Boeing augmente les siens parce qu’ils n’ont plus rien à vendre ». Il n’y a donc « pas d’opportunité » d’acheter de nouveaux avions, explique le dirigeant ; le MAX 10 qui vient de faire son rollout a déjà été évoqué, tout comme cent A321neo pour Lauda.

Boeing 737 MAX : Ryanair, LOT Polish Airlines, FAA – et 2021 ? 1 Air Journal

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Le CEO de LOT Polish Airlines (cinq des quinze MAX 8 livrés) a de son côté expliqué que la perte de capacité provoquée par l’immobilisation des avions « freine ses plans de croissance ». Rafal Milczarski à déclaré à ATW qu’après avoir transporté 8,9 millions de passagers l’année dernière, elle tablait sur 10 millions en 2019 : « nous en aurions transporté plus, mais nous n’avons pas été en mesure de trouver toute la capacité dont nous avions besoin sur le marché » suite à l’immobilisation au sol des 737 MAX, a-t-il déclaré. Prolonger les contrats de location de ses 737 Classic n’était en outre pas envisageable en raison de leur consommation en carburant et de leurs émissions de CO2, « 30% supérieures à celles du 737 MAX », a-t-il ajouté.

Alaska Airlines, qui maintient pour l’instant au 13 février 2020 une éventuelle mise en service des 32 737 MAX 9 commandés, a dévoilé de nouvelles routes sur lesquelles ils pourraient être déployés selon Airlineroute : les MAX 9 voleraient dès février entre Seattle et Los Angeles et San Diego, et dès le 20 mars entre Portland et Seattle, entre Seattle et Las Vegas et entre Las Vegas et Portland. Rappelons qu’American Airlines, United Airlines et la low cost Southwest Airlines ont toutes reportées à début mars au plus tôt un retour dans les airs de leurs monocouloirs remotorisés.

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Côté régulateur, la FAA américaine a selon l’agence Reuters annoncé à Boeing qu’elle sera la seule à délivrer des certificats de navigabilité (airworthiness certificate) de 737 MAX aux compagnies aériennes, alors que la tâche était jusque là partagée. La Federal Aviation Authority a « déterminé que l’intérêt public et la sécurité dans le transport aérien nécessitaient que la FAA conserve le pouvoir de délivrer des certificats de navigabilité, et des certificats de navigabilité pour l’exportation, de tous les avions 737 MAX ». Elle conservera ce pouvoir jusqu’à être convaincue que Boeing a « mis en place des processus de contrôle de la qualité et de vérification pleinement fonctionnels », et que les autres procédures de Boeing respectaient toutes les normes réglementaires. « Nous continuons à suivre la direction de la FAA et des régulateurs mondiaux », a déclaré le porte-parole de Boeing Gordon Johndroe dans un courriel à l’agence.

Cette crise du 737 MAX pourrait avoir des conséquences économiques jusqu’en 2021, a de son côté prévenu le CEO de SMBC Aviation Capital, société de leasing irlandaise dont le portefeuille comprend 133 Boeing remotorisés. Peter Barrett a rappelé dans ATW qu’il fallait faire la différence entre la date de certification, par la FAA puis par les autres régulateurs dans le monde, et la date effective de retour dans les airs pour chaque compagnie aérienne, surtout pour celles ayant déjà reçu des 737 MAX. Ce processus « n’est pas simple », et il s’attend à ce que les extensions de contrats de location liés à l’immobilisation au sol des appareils « allaient continuer pendant six à douze mois ». Le dirigeant, qui se dit « prudent », estime que le feu vert de la FAA devrait survenir au premier trimestre 2020 ; mais le début des opérations en 737 MAX prendra « beaucoup de temps ». 

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