Il resterait encore environ 5000 Français coincés à l’étranger en raison de la pandémie de Covid-19, et le groupe Air France-KLM continue d’opérer des vols de rapatriement au gré des autorisations locales. Mais avec environ 5% des vols habituels opérés par les deux compagnies aériennes, il faut trouver de l’espace pour garer les avions inutilisés.

Depuis le 15 mars 2020 et le début du confinement en France, quelque 130.000 Français ont été rapatriés dans l’hexagone depuis 140 pays selon le Quai d’Orsay – un « exploit » selon les sénateurs pour la cellule de crise du ministère des Affaires étrangères. La plupart l’ont été à bord de vols Air France, comme par exemple dimanche au départ de Cotonou puis de Libreville qui a ramené du Gabon « 367 passagers dont 280 compatriotes, Français de passage ou personnes vulnérables résidant au Gabon ; 87 étrangers de passage (dont 67 Européens), pour partie conjoints de compatriotes de passage » selon l’ambassade de France au Gabon. Parmi ces passagers, 154 venaient de Port-Gentil par quatre vols organisés le même jour par l’ambassade de France en liaison avec Afrijet. Un nouveau vol AF entre Libreville et Paris-CDG est à l’étude. La compagnie française a également opéré hier un vol spécial depuis Ho Chi Minh Ville au Vietnam, et prévu pour demain un vol de rapatriement au départ de Buenos Aires en Argentine.

Interrogée dans Le Figaro, la directrice générale d’Air France Anne Rigail a rappelé que depuis la mi-mars, 240.000 ressortissants français et européens ont été rapatriés depuis 82 pays. La crise vécue par la compagnie aérienne, qui « se différencie de toutes les précédentes par sa brutalité et son ampleur », s’est déroulée en trois étapes : le 30 janvier « avec l’arrêt de nos vols vers la Chine, décidé volontairement afin de protéger nos salariés et nos clients » ; le 12 mars avec l’interdiction par Donald Trump des voyages aux États-Unis pour les étrangers ; et le 16 mars avec la décision de confinement en France. « Nous avons alors perdu en quelques jours 95 % de notre activité, avec la fermeture de beaucoup de pays que nous desservons », souligne la dirigeante, pour qui au-delà des vols de rapatriements « il nous semble aussi important de maintenir une ligne de vie pour assurer la continuité territoriale ».

Anne Rigail n’a pas confirmé le montant d’un éventuel emprunt de 6 milliards d’euros par Air France-KLM, qui serait garanti par la France et les Pays-Bas. Mais elle s’est félicitée de la promesse d’aide de la part des deux Etats ; « le groupe dispose d’une trésorerie de 6 milliards d’euros, mais nous aurons besoin rapidement d’un soutien financier » pour passer la crise et « se préparer au redémarrage de l’activité en 2021 ou 2022 qui s’accompagnera d’une consolidation dans le secteur ». Sans moyens conséquents, Air France-KLM serait marginalisé face à des acteurs comme Singapore Airlines, qui vient d’être renflouée à hauteur de 13 milliards de dollars. Mais il faudra « rembourser cette somme sur une durée de quatre ans, voire six maximum, ce qui signifie 800 millions à 1 milliard à sortir chaque année. Vu les perspectives de reprise, ce ne sera pas chose facile », a expliqué une source de l’entreprise proche du dossier à Libération.

Air France-KLM : rapatriements, argent et problèmes de parking 1 Air Journal

©Air France

En attendant, Air France comme KLM doivent gérer le stationnement à long terme de leurs avions inutilisés. Pour la première, l’immobilisation de 180 avions pour au moins un mois mobilise un millier d’employés de la maintenance ; le directeur général adjoint Engineering & Maintenance Géry Mortreux a détaillé les trois niveaux de stockage envisagés dans Les Echos : « le parking normal, pour une durée de 2 à 4 semaines, le stockage actif, pour un à trois mois, et le stockage prolongé, au-delà de trois mois ». Pour un stockage actif, « il faut compter environ 150 heures de main-d’œuvre selon le type d’avion, en incluant le temps nécessaire pour sa remise en service », tandis que dans le cas du stockage prolongé, « il faut compter environ 800 heures », a-t-il précisé.

A l’aéroport d’Amsterdam, KLM Royal Dutch Airlines n’est pas en reste : plus de 200 avions sont désormais parqués à Schiphol. Les destinations qu’elle continue de desservir dans le cadre de son « calendrier restreint » sont exploitées à l’aide d’Embraer 190 et Boeing 737 et 777-300ER, les vols de rapatriement étant parfois opérés à l’aide des 777-200ER, 787-9 et 787-10 (les 747 sont désormais sortis de la flotte). La piste 18L-36R (« Aalsmeerbaan ») est entièrement dédiée au stockage des avions inutilisés par KLM et sa filiale low cost Transavia, tout comme 4 des 6 jetées de Schiphol (seules les D et E sont encore utilisés par les passagers).

La compagnie néerlandaise décrit dans son blog le « Great Big Schiphol Parking Puzzle, car chaque position ou stand ne convient pas à chaque type d’avion. C’est tout un défi de garer tous les avions à leur place. Plusieurs aspects sont impliqués dans cette opération. La taille d’un avion est bien sûr un facteur clé. Vous devez empêcher les avions de bloquer les autres, par exemple, si vous devez les remorquer pour l’entretien. Par conséquent, l’un des critères de stationnement est qu’il devrait y avoir suffisamment d’espace entre les aéronefs, afin qu’ils puissent être facilement déplacés pour inspection. Cependant, tous les types d’avions doivent être regroupés aussi étroitement que possible, afin de garantir que le stationnement et la maintenance peuvent être effectués aussi efficacement que possible. Ce sont tous des facteurs qui doivent être pris en compte ».

Air France-KLM : rapatriements, argent et problèmes de parking 2 Air Journal

©KLM/Politheli