Face à la pandémie de coronavirus, le groupe Lufthansa a annoncé la fermeture de sa filiale low cost Germanwings, le départ de 42 avions sur les 763 dont six Airbus A380, et de nouvelles mesures sur l’emploi notamment chez Brussels Airlines. Et pour l’après-crise, il envisage une baisse significative du nombre de vols. Les syndicats sont déjà vent debout.

Pour expliquer cette première « réduction permanente de capacité », le Conseil d’Administration de Deutsche Lufthansa AG a annoncé le 7 avril 2020 ne pas s’attendre à ce que l’industrie aéronautique « retrouve très rapidement les niveaux d’avant crise du coronavirus ». Selon son évaluation, il faudra des mois avant que les restrictions mondiales sur les voyages soient complètement levées, et des années avant que la demande mondiale ne revienne aux niveaux d’avant crise. Sur la base de cette évaluation, le Conseil d’Administration a décidé de prendre des mesures de grande envergure pour réduire la capacité des opérations aériennes et de l’administration à long terme. Des décisions qui affecteront « presque toutes les opérations de vol de Lufthansa Group ».

Chez Lufthansa, six Airbus A380 et sept A340-600 ainsi que cinq Boeing 747-400 seront « définitivement mis hors service » ; en outre, onze A320 seront retirés des opérations court-courriers. La vente des six A380 à Airbus était « déjà prévue pour 2022 », souligne la compagnie aérienne. La décision d’éliminer progressivement les sept A340-600 et cinq 747-400 « a été prise sur la base des inconvénients environnementaux et économiques de ces types d’avions ». Avec cette décision, Lufthansa va donc réduire la capacité de ses hubs dans les aéroports de Francfort et de Munich. Lufthansa Cityline retirera également du service trois A340-300 ; depuis 2015, le transporteur régional assure des vols vers des destinations touristiques long-courriers pour Lufthansa. Sur le segment des vols court-courriers, dix A320 supplémentaires « devraient être progressivement retirés du marché ».

Les activités low cost long-courrier d’Eurowings, qui sont gérées sous la responsabilité commerciale de Lufthansa, seront également réduites. En complément, l’objectif de la filiale  de regrouper les opérations aériennes en une seule unité, qui avait été défini avant la crise, va maintenant être accéléré. Les opérations de vol de Germanwings seront interrompues ; « toutes les options qui en découlent doivent être discutées avec les syndicats respectifs », précise un communiqué.

Covid-19 : Lufthansa restructure massivement 1 Air Journal

©Germanwings

Les programmes de restructuration déjà engagés chez Austrian Airlines et Brussels Airlines seront « intensifiés » en raison de la crise du coronavirus, les deux compagnies devant notamment « s’employer à réduire leur flotte ». Chez la compagnie belge, la porte-parole Kim Daenen a déclaré dans Le Vif que l’objectif est toujours de devenir structurellement rentable d’ici 2022, « et nous examinons maintenant les mesures que nous pouvons prendre et en accélérer d’autres ». Des mesures ont déjà été prises pour protéger la trésorerie, telles que le chômage temporaire du personnel et l’annulation des vols jusqu’au 15 mai.

Swiss International Air Lines adaptera également la taille de sa flotte en retardant les livraisons de nouveaux avions court-courriers (16 A320neo et 8 A321neo en attente de livraison), et « envisagera le retrait progressif des avions plus anciens ». Le groupe de Star Alliance précise de plus que ses compagnies « ont déjà résilié presque tous les accords de wet lease avec d’autres compagnies aériennes ». 

L’objectif reste le même pour tous les employés touchés par les mesures de restructuration, affirme le groupe : « maintenir le plus grand nombre d’emplois possible au sein de Lufthansa Group. C’est pourquoi des discussions avec les syndicats et les comités d’entreprise doivent être organisées rapidement pour discuter, entre autres, de nouveaux modèles d’emploi », conclut le communiqué.

On savait déjà que plus de 87.000 des 135.000 salariés du groupe Lufthansa vont être affectés par des mesures de réduction du temps de travail « en mars et en avril », et les annonces de mardi ont été mal accueillies par les syndicats. Chez Brussels Airlines par exemple, ils reprochent à la direction de ne rien avoir dit sur ce nouveau plan lors d’un conseil d’entreprise lundi, consacré à la possibilité d’une aide d’Etat. « Le personnel est vraiment inquiet, surtout avec ce qu’il lit dans la presse. Tout le monde nous téléphone ou nous laisse des messages », témoigne Anita van Hoof du SETCa dans L’Echo ; « j’ai l’impression que le management belge n’est au courant de rien comme d’habitude », tranche Didier Lebbe de la CNE. Pour Filip Lemberechts de l’ACLVB, une restructuration lourde et une réduction des effectifs importante « mettraient en danger l’avenir de Brussels Airlines et empêcheraient la compagnie aérienne de bénéficier de la croissance attendue sur les vols long-courrier vers l’Afrique, où elle a acquis des décennies d’expérience depuis l’époque de la Sabena ».

Le ton est similaire en Allemagne à propose de la disparition annoncée de Germanwings, qui opérait pour le compte d’Eurowings : dans un appel conjoint publié hier, les syndicats et associations VC, UFO, Verdi, IGL / TGL et ACA ont souligné que  la stabilisation de Lufthansa n’est possible qu’avec tous les employés ». Pour Markus Wahl, président de Vereinigung Cockpit (pilotes), l’annonce selon laquelle, dans une crise sans précédent telle que la crise actuelle, « une partie de la main-d’œuvre sera confrontée à une menace existentielle, rencontre l’incompréhension. À l’heure actuelle, chaque décision doit tenir compte des préoccupations de tous les employés. C’est la seule façon pour les employés de se tenir derrière le groupe et de travailler à la stabilisation. La crise du coronavirus a particulièrement touché l’industrie aéronautique. De grands efforts seront nécessaires pour surmonter cette crise. En tant que syndicats du groupe Lufthansa, nous offrons notre soutien à des solutions qui peuvent être soutenues par tous les employés ».

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