Le groupe Lufthansa compte supprimer quelque 10.000 emplois à partir de l’année prochaine, alors que la pandémie de Covid-19 continue d’affecter ses résultats financiers. Mais il poursuit le renouvellement de sa flotte, avec l’acquisition de dix Airbus A350 et Boeing 787 supplémentaires. Et va équiper ses 777F d’un revêtement inspiré de la peau des requins, afin d’en réduire la consommation.

Après avoir vu au 1er trimestre 2021 son chiffre d’affaires reculer de 60% par rapport au T1 de l’année dernière (qui avait compté deux premiers mois quasi-normaux de trafic avant le déclenchement de la pandémie de Covid-19) et affiché une perte nette de 1,14 milliards d’euros, le groupe allemand a annoncé de nouvelles conséquences sur l’emploi. Le directeur financier Remco Steenbergen a confirmé que Lufthansa Group « se prépare à des licenciements », après avoir déjà supprimé 24.000 postes durant les douze derniers mois. Les 10.000 postes qui seront supprimés à partir de 2022 laisseront le groupe avec environ 60.000 employés, soit un effectif réduit de 43% par rapport à l’avant-crise sanitaire.

En octobre dernier, le PDG Carsten Spohr promettait pourtant de « conserver au moins 100.000 des 130.000 postes du groupe », tout en annonçant un programme de vols pour l’hiver similaire à ce qu’il était dans les années 70. Mais la résurgence de la pandémie a mis à mal ces prévisions, avec une capacité espérée désormais limitée à 40% des niveaux de 2019. Sa stratégie de réduction des coûts plus stricte du groupe devrait l’aider à réduire la consommation mensuelle de trésorerie à 200 millions d’euros par mois.

Ces conséquences sur l’emploi ne se retrouvent pas dans la stratégie de renouvellement de la flotte : le Conseil d’administration de la compagnie nationale allemande a annoncé hier avoir approuvé l’acquisition de dis avions long-courrier supplémentaires. Les cinq Airbus A350-900 nouvellement commandés seront livrés en 2027 et 2028, et porteront à 45 le nombre total d’appareils attendus. Dix-sept A350 sont déjà en service, avec des configurations tri-classes allant de 293 à 319 sièges. Le groupe Lufthansa a également « convenu avec Airbus d’une restructuration des livraisons prévues ».

Plus intéressant est la commande de cinq Boeing 787-9 Dreamliner, un modèle dont l’entrée en service chez Lufthansa est prévue « dès l’hiver prochain ». Ces cinq « white tails » (assemblés durant les douze derniers mois mais pas livrés) la porte à 25 le nombre de Dreamliner attendus, sans oublier les vingt 777-9. Là encore, le groupe dit avoir « conclu un accord avec Boeing sur un plan de livraison restructuré », sans plus de détail.

Un total de 175 nouveaux avions seront réceptionnés par le groupe durant la prochaine décennie, 115 autres (dont les 14 A380 de Lufthansa, 8 en stockage de longue durée, auxquels le dirigeant « ne voit aucun avenir ») étant déjà programmés pour la retraite ou cloués au sol temporairement. Carsten Spohr expliquait hier : « même en ces temps difficiles, nous continuons d’investir dans une flotte du groupe Lufthansa plus moderne, plus efficace et moins polluante. Dans le même temps, nous poursuivons la modernisation de notre flotte long-courrier encore plus rapidement que prévu avant la pandémie de coronavirus, en raison d’opportunités anticycliques. Les nouveaux avions sont les plus modernes de leur genre. Nous voulons étendre davantage notre rôle de leader mondial, entre autres, avec des produits haut de gamme de pointe et une flotte à la pointe de la technologie – en particulier parce que nous avons une responsabilité vis-à-vis de l’environnement ». 

Outre ce renouvellement de la flotte long-courrier, Lufthansa se concentre également sur « les dernières technologies, une efficacité maximale et le plus haut niveau de confort client sur les liaisons court-courrier ». Au cours de 2021, elle prendra livraison en moyenne chaque mois d’un nouvel A320neo pour ses les liaisons court et moyen-courriers. La livraison de 107 autres A320neo et A321neo est prévue jusqu’en 2027.

La flotte cargo aussi va être modernisée : à partir de l’année prochaine, tous les Boeing 777F (neuf livrés, un dixième attendu à l’automne) bénéficieront d’AeroSHARK, une technologie de revêtement innovante de Lufthansa Technik et BASF. Ce « film de surface » constitué de riblets mesurant environ 50 micromètres « imite les propriétés de la peau de requin » et optimise donc l’aérodynamisme des parties liées à l’écoulement de l’air. Cela signifie que moins de carburant est nécessaire dans l’ensemble : sur les 777F, Lufthansa Technik estime une réduction de la traînée de « plus de 1% », soit pour les dix avions des économies annuelles d’environ 3700 tonnes de kérosène et un peu moins de 11 700 tonnes d’émissions de CO2, « soit l’équivalent de 48 vols de fret de Francfort à Shanghai ».

Plus la résistance au frottement d’un avion en vol est faible, plus la consommation de carburant est faible, rappelle le communiqué de la compagnie allemande : en utilisant la nature comme modèle, l’industrie aéronautique « recherche depuis de nombreuses années des moyens de réduire la traînée aérodynamique. Lufthansa Technik et BASF ont donc « réussi à faire la percée dans le cadre d’un projet commun », AeroSHARK. Lufthansa Technik obtiendra un certificat de type supplémentaire (STC) pour le 777F de l’Agence de la sécurité aérienne de l’Union européenne (EASA), nécessaire à l’exploitation.

« La responsabilité envers l’environnement et la société est un sujet stratégique clé pour nous », a déclaré Christina Foerster, membre de la direction de Deutsche Lufthansa AG en charge du développement durable. « Nous avons toujours joué un rôle de premier plan dans l’introduction de technologies respectueuses de l’environnement. La nouvelle technologie de peau de requin pour les aéronefs montre ce que des partenaires forts et hautement innovants peuvent réaliser collectivement pour l’environnement. Cela nous aidera à atteindre notre objectif de neutralité climatique d’ici 2050 ».

Lufthansa : emploi, A350, 787 et peau de requin 1 Air Journal

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