Le rapport préliminaire sur le crash du vol YT691 de la compagnie aérienne Yeti Airlines qui avait fait 72 morts le mois dernier au Népal aurait été causé par une erreur humaine selon le rapport préliminaire.

Publié le 13 février 2023 par l’AAIC népalaise (Commission d’enquête sur les accidents aériens), ce rapport préliminaire confirme la thèse déjà évoquée de la mise en drapeau des hélices, provoquant le décrochage de l’ATR 72-500 et son écrasement dans un ravin avant de s’embraser, à quelque 1500 mètres du début de la piste du nouvel aéroport le nouvel aéroport de Pokhara. L’avion de la compagnie privée népalaise, immatriculé 9N-ANC et livré en 2007 à la société de leasing Investec, opérait le 15 janvier 2023 le vol YT691 entre sa base à Katmandou-Tribhuvan et le nouvel aéroport, qui avait ouvert ses portes quinze jours plus tôt à 3 kilomètres de l’ancien.

 

Selon ce rapport, l’équipage en était à son troisième vol de la journée ; le commandant de bord aux commandes (PF) était en cours de familiarisation pour opérer vers Pokhara, avec à ses côté un pilote instructeur (PM). Lors du premier contact avec la tour de Pokhara, le contrôle aérien (ATC) a assigné la piste 30 à l’atterrissage ; mais lors des phases ultérieures du vol, l’équipage a demandé et reçu l’autorisation de l’ATC d’atterrir sur la piste 12.

A 10:51:36, l’avion est descendu (de 6 500 pieds à cinq miles de VNPR et a rejoint la trajectoire vent arrière de la piste 12 au nord de la piste. L’avion a été identifié visuellement par l’ATC pendant l’approche. A 10:56:12, les pilotes ont sorti les volets en position 15 degrés et ont mis le levier des trains d’atterrissage en position sortie. Le réglage de décollage (TO) a été sélectionné sur le panneau de gestion de l’énergie.

À 10:56:27, le PF a débrayé le système de pilote automatique à une altitude de 721 pieds au-dessus du sol (AGL). Le PF a ensuite demandé des “FLAPS 30” à 10:56:32, et le pilote instructeur a répondu “Flaps 30 and descending”, selon les données de l’enregistreur des voix du cockpit (CVR). Mais les données de l’enregistreur de données de vol (FDR) n’ont pas enregistré de mouvement de la surface des volets à ce moment-là. Au contraire, la vitesse de rotation de l’hélice (Np) des deux moteurs a diminué. simultanément à moins de 25%, et le couple (Tq) a commencé à diminuer jusqu’à 0% – ce qui correspond à la mise en drapeau des deux hélices.

Le CVR n’a enregistré qu’une seule alerte ‘Master Caution’, à 10:56:36. L’équipage a ensuite exécuté la liste des vérifications avant l’atterrissage, avant d’amorcer « le virage à gauche sur le segment de base ». Pendant ce temps, l’angle de la manette des gaz est passé de 41% à 44%. À ce moment-là, les vitesses de rotations des deux hélices ont été enregistrés comme données non calculées (NCD) dans le FDR et le couple (Tq) des deux moteurs était à 0%. « Lorsque les hélices sont en drapeau, elles ne produisent pas de poussée », souligne le rapport, les enquêteurs observant que  les deux moteurs de l’ATR tournaient au ralenti pendant le vol de l’événement afin d’éviter un surcouple. D’après les données du FDR, tous les paramètres enregistrés concernant les moteurs n’ont montré aucune anomalie.

À 10:56:50, lorsque l’appel radio d’altitude de cinq cents pieds a été annoncée, un autre “clic” a été entendu. L’avion a atteint un angle d’inclinaison maximal de 30 degrés à cette altitude. Les données Np et Tq enregistrées restent invalides. L’amortisseur de lacet s’est débranché quatre secondes plus tard. Le PF a consulté le PM pour savoir s’il fallait poursuivre le virage à gauche et le PM a répondu de poursuivre le virage. Par la suite, le PF a demandé au PM s’il devait continuer à descendre et le PM a répondu que ce n’était pas nécessaire, demandant de « mettre un peu de puissance ». À 10:56:54, un autre clic a été entendu, suivi par le mouvement de la surface des volets vers la position 30 degrés.

Lorsque l’ATC donne l’autorisation d’atterrir à 10:57:07, le PF a mentionné à deux reprises qu’il n’y avait pas de puissance en provenance des moteurs. A 10:57:11, les manettes de puissance ont été avancées d’abord à 62 degrés, puis à la position de puissance maximale. Cela a été suivi d’un “clic” sonore à 10:57:16. Une seconde après, l’avion était à l’amorce de son dernier virage à 368 pieds AGL, le régime de la turbine haute pression (Nh) des deux moteurs est passé de 73% à 77%.

Le rapport préliminaire souligne que le PF a remis les commandes de l’avion au PM à 10:57:18 ; deux secondes plus tard, le pilote instructeur alors aux commandes répète à nouveau qu’il n’y a pas de puissance dans les moteurs. À 10:57:24, alors que l’avion se trouvait à 311 pieds AGL, le vibreur de manche s’est déclenché, avertissant l’équipage que l’angle d’attaque (AOA) de l’avion avait augmenté jusqu’au seuil du vibreur.

A 10:57:26, une deuxième séquence d’avertissement de vibreur de manche s’est déclenchée, lorsque l’avion s’est brusquement incliné vers la gauche. Par la suite, l’alerte d’altitude radio aux 200 pieds a retenti, et les clics et le vibreur de manche ont cessé. À 10:57:32, un bruit d’impact a été entendu dans le CVR. Les deux boîtes noires ont arrêté l’enregistrement à 10:57:33 et 10:57:35 respectivement.

L’enquête va se poursuivre pour tenter d’expliquer la mise en drapeau des hélices, mais ce rapport préliminaire semble bien impliquer une erreur humaine et non une panne mécanique ou électronique. Le BEA français, l’avionneur ATR, et le motoriste Pratt & Whitney participent à l’enquête.

Aucun des 68 passagers et 4 membres d’équipage n’a survécu : 53 Népalais, cinq Indiens, quatre Russes, deux Sud-Coréens et un Français, un Irlandais, un Australien et un Argentin (y compris six enfants) se trouvaient à bord, les deux pilotes et deux membres du personnel de cabine étant tous népalais.

Crash de Yeti Airlines : une erreur humaine ? 1 Air Journal

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