Airbus a demandé hier l’« immobilisation immédiate » d’environ 6 000 avions de la famille A320 pour corriger un défaut logiciel vulnérable aux radiations solaires intenses. Ce rappel massif, émis après un incident sur un vol de JetBlue entre Cancun et New York fin octobre, affecte une grande partie de la flotte de monocouloirs en service dans le monde.

L’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) a validé cette mesure d’urgence, soulignant que le problème pourrait, dans le pire des cas, causer un mouvement non commandé de la gouverne de profondeur.​ En France, les perturbations restent modérées, avec une quinzaine de vols annulés hier soir aux aéroports de Paris-CDG et Paris-Orly, principalement vers des destinations comme Marseille, Nice ou Tunis. Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, a minimisé l’ampleur dans l’Hexagone, déclarant au micro de BFMTV : « Il y a assez peu d’impact sur le territoire national, avec de nombreuses mises à jour logicielles qui ont eu lieu dans la nuit […] On avait évoqué la possibilité d’un millier d’appareils. Il semble qu’on ne parle maintenant que d’une centaine d’appareils ».

Air France a annulé 35 vols mais assure un retour progressif à la normale ce samedi, hormis sur son réseau régional dans les Antilles. Des low cost qui opère des flottes 100% Airbus, comme easyJet ou Wizz Air, ont terminé le déploiement de la mise à jour logicielle exigée par l’avionneur dans la nuit, permettant un programme de vols sans annulation dès ce samedi.

Etats-Unis : le casse-tête du Thanksgiving
Aux États-Unis, le timing coïncide avec le week-end de Thanksgiving, touchant environ 500 appareils. American Airlines, qui prévoit d’achever les mises à jour sur 340 de ses A320 ce week-end, annonce des centaines de retards. Le régulateur américain, l’Administration fédérale de l’aviation (FAA), coordonne les efforts pour minimiser les impacts, avec un objectif de reprise quasi totale d’ici deux jours pour la plupart des A320 des compagnies aériennes américaines.

En Amérique du Sud, la compagnie aérienne colombienne Avianca, avec 70% de sa flotte concernée, suspend la vente de billets d’avion jusqu’au 8 décembre et anticipe « des perturbations importantes dans les dix jours à venir ». En Océanie et en Asie, Air New Zealand annonce des annulations multiples, tandis qu’Air India a déjà corrigé 40% de ses A320 sans annuler de vol pour l’instant.​ Vietnam Airlines indique qu’il faut juste une heure à ses équipes pour mettre à jour un avion, et n’annule aucun vol. À l’échelle européenne, le trafic aérien subit des retards et annulations, particulièrement au Royaume-Uni où l’Autorité de l’aviation civile britannique (CAA) alerte sur des disruptions potentielles. En Allemagne et en Espagne, plusieurs aéroports rapportent des ajustements d’horaires, aggravés par le trafic dense de fin novembre.​

Vers un retour à la normale malgré les défis
En pénétrant dans un composant critique des systèmes de commandes de vol « fly‑by‑wire », les particules (protons, électrons) des radiations solaires peuvent provoquer une corruption fugace de données ou un dysfonctionnement ponctuel d’un calculateur. Dans la plupart des cas, ces perturbations sont corrigées par les redondances et protections logicielles, mais si le logiciel ou l’architecture ne sont pas suffisamment robustes, cette corruption peut se traduire par un ordre erroné envoyé aux gouvernes ou par une alerte nécessitant l’intervention immédiate de l’équipage.

Airbus recommande une action immédiate sur les calculateurs de commandes de vol des A320 concernés, via une modification logicielle et, pour une partie de la flotte, une intervention matérielle. L’avionneur a transmis aux compagnies aériennes une « Alert Operators Transmission » qui impose soit l’installation d’une nouvelle version corrigée du logiciel ELAC (Elevator Aileron Computer), soit un retour à la version précédente jugée non vulnérable, opération qui doit être réalisée avant le prochain vol commercial. Pour la majorité des quelque 6 000 A320 en service dans le monde, une simple mise à jour ou une rétrogradation logicielle suffit et prend quelques heures. Mais pour environ un millier d’appareils plus anciens, l’avionneur préconise en plus le remplacement de certains modules matériels des calculateurs de commandes de vol, une intervention plus lourde qui peut immobiliser l’avion plusieurs jours ou semaines.

Jouant la transparence, Airbus s’excuse pour ces désagréments, reconnaissant « des perturbations opérationnelles pour les passagers et les clients ». Guillaume Faury, président-directeur général d’Airbus, déclare sur son compte Linkedln : « Je tiens à présenter mes sincères excuses à nos clients et aux passagers impactés. La sécurité est notre priorité absolue, notamment pour les millions de personnes qui voyagent quotidiennement à bord de nos Airbus. Nos équipes travaillent sans relâche pour accompagner nos opérateurs et déployer ces mises à jour au plus vite afin de remettre les avions en service et de reprendre un fonctionnement normal, avec le niveau de sécurité que vous attendez d’Airbus ».

Immobilisation de 6 000 Airbus A320 : l'aérien français relativement épargné, le trafic mondial mis à l’épreuve 1 Air Journal

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