Avec un bénéfice net record de 15,2 millions d’euros en 2025, la compagnie Corsair tourne la page d’une décennie de turbulences. Pourtant, le redressement financier s’opère sur fond d’incertitudes, alors que Bruxelles poursuit son enquête sur les aides publiques accordées lors de la restructuration de la compagnie.

Corsair a clos l’exercice 2024-2025 sur des chiffres très positifs : un chiffre d’affaires de 712 millions d’euros et un résultat d’exploitation de 26,4 millions d’euros, presque multiplié par dix en un an. Selon Pascal de Izaguirre, PDG de Corsair, « C’est un exercice significativement positif ». Cette performance est d’autant plus notable qu’elle a été obtenue malgré une baisse de 6 % des rotations, due notamment à la suspension de la ligne Paris-Montréal, à des tensions sociales aux Antilles et au passage du cyclone Chido qui a touché Mayotte fin 2024.

Le pivot du redressement de Corsair ? Un renouvellement complet et rapide de sa flotte, achevé fin 2024. La compagnie exploite désormais exclusivement 9 Airbus A330neo de dernière génération, tous configurés en trois classes (20 sièges en Business, 21 en Premium et 302 en Economy). Ces appareils permettent de réduire la consommation de carburant, les émissions de CO₂ et l’empreinte sonore, tout en garantissant un haut niveau de service et de confort sur toutes les destinations. « Nous avons fait le pari gagnant de renouveler notre flotte en pleine crise du Covid, ce qui nous permet aujourd’hui de proposer un produit de très grande qualité », détaille le président.

Corsair mise sur son programme de vols directs vers l’outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Réunion) et l’Afrique, avec au moins une rotation quotidienne sur chaque destination et jusqu’à deux en haute saison. Elle demeure la seule compagnie à relier directement les Antilles, la Réunion et la province. L’amélioration du taux de remplissage (+2,4 points) et la hausse du prix moyen des billets témoignent du dynamisme commercial et de l’attractivité renouvelée de la compagnie, qui capitalise également sur la montée en gamme des services : « L’expérience client est au cœur de notre offre », rappelle Pascal de Izaguirre.

Ombres au tableau : Bruxelles enquête

Cette nette embellie ne dissipe pas toutes les inquiétudes. En décembre 2020, dans le contexte de la crise du Covid, Bruxelles avait approuvé un plan de restructuration de la compagnie aérienne française en difficulté, assorti de mesures de soutien de l’État français pour un montant total de 136,9 millions d’euros. Mais fin 2023, la France avait présenté à la Commission des modifications à ce plan, qui comprennent « des ajustements des instruments de financement existants ainsi que des incitations fiscales supplémentaires».

En février 2024, la Commission européenne a lancé une procédure approfondie concernant le plan de restructuration de Corsair, soupçonnant d’éventuelles aides publiques non conformes. Elle a élargi son enquête au printemps : Paris doit à présent s’expliquer sur l’octroi de 32,4  millions d’euros d’aides supplémentaires, ainsi que sur le respect de l’obligation de limiter la flotte à neuf appareils. L’octroi d’aides publiques dans l’UE est strictement encadré afin de préserver les règles de concurrence équitables au sein du marché unique. La Commission rappelle que « toute aide illégale pourra faire l’objet d’une récupération », ce qui pourrait menacer le fragile équilibre retrouvé par la compagnie.

15,2 millions d’euros de bénéfice : Corsair prospère, Bruxelles enquête 1 Air Journal

@ A.Doumenjou/Airbus