La Russie a franchi une étape symbolique dans sa quête d’autonomie aéronautique. Le Superjet 100 (rebaptisé SJ-100), premier avion de ligne construit entièrement avec des composants nationaux, a effectué vendredi son vol inaugural, a annoncé le conglomérat industriel et de défense Rostec.

Cet essai marque une avancée décisive du programme dit « d’import substitution », lancé après l’imposition de sanctions occidentales qui ont privé Moscou d’accès à de nombreux équipements étrangers. Selon Rostec, l’appareil a remplacé « des dizaines de composants importés », allant du fuselage aux systèmes de commandes de vol en passant par le train d’atterrissage.

Le vol d’essai, d’une durée d’environ une heure, a atteint une vitesse de près de 500 km/h et une altitude de 3 000 mètres. L’avion a décollé du centre de production Yakovlev de Komsomolsk-sur-l’Amour, où 24 exemplaires sont actuellement en cours d’assemblage à différents stades. Les appareils devront encore réaliser des vols de certification et obtenir l’aval de l’Agence fédérale du transport aérien (Rosaviatsia) avant toute livraison. Les livraisons du Superjet 100 de fabrication entièrement russe ont déjà été annoncées pour se réaliser en 2026.

L’avionneur public United Aircraft Corporation (UAC), qui a repris la direction du programme l’an dernier après des retards et des doutes sur sa fiabilité, a précisé que 200 vols d’essai seraient nécessaires d’ici fin 2025 avant d’entrer en production de série.

Le SJ-100 est une version modernisée du Superjet 100, initialement lancé avec une forte dépendance aux industriels occidentaux. Avant 2022, le programme reposait notamment sur le moteur franco-russe SaM146, développé par Safran et NPO Saturn. Mais la guerre en Ukraine et les sanctions européennes ont contraint Moscou à accélérer le développement du nouveau moteur national PD-8, qui devrait équiper les versions de série du SJ-100. La certification du moteur PD-8 du Superjet devrait avoir lieu à l’automne 2025, une étape cruciale pour garantir le fonctionnement sûr et efficace du nouvel avion.

L’avion de 100 places est destiné au marché intérieur russe, où il doit substituer les Airbus A320 et Boeing 737, désormais impossibles à importer légalement et difficiles à maintenir sans pièces de rechange officielles. Selon les estimations du ministère russe de l’Industrie et du Commerce, la flotte nationale compterait environ 600 appareils occidentaux immobilisés à moyen terme si les sanctions se prolongent.

Le Superjet 100 a totalisé 385 commandes depuis ses débuts en 2005 et il reste encore à l’avionneur russe plus de 200 livraisons à ce jour à effectuer. Si le record de livraisons annuelles est monté jusqu’à 28 exemplaires (27 en 2021), la production s’est tarie quand la Russie a envahi l’Ukraine et que les sanctions internationales envers la Russie sont tombées. UAC n’a réussi à n’en livrer que sept en 2022, un en 2023 et zéro depuis.

Moscou présente le SJ-100 comme l’un des piliers de son plan de relance aéronautique, aux côtés du MC-21, dde Yakovlev, censé concurrencer l’A320neo et le 737 MAX. Toutefois, nombre d’analystes doutent de la capacité russe à produire en série ces aéronefs dans un contexte d’isolement technologique. La certification internationale de l’appareil semble désormais hors de portée, limitant ses perspectives à la Russie et à quelques alliés politiques.

Pour Moscou, le premier vol du SJ-100 intégralement domestique est néanmoins une victoire de communication, démontrant une volonté d’autosuffisance industrielle face aux sanctions.

Le SJ-100, premier Superjet entièrement produit en Russie, effectue son vol inaugural 1 Air Journal

©United Aircraft Corporation