L'aéroport privé de Ciudad Real de La Mancha, inutilisé depuis trois ans, a été mis en vente lundi avec un prix de départ de 100 millions d’euros alors qu’il en avait coûté dix fois plus. Le processus de vente va courir jusqu’au 27 décembre, a déclaré hier le tribunal de commerce de la petite ville située à 200 kilomètres au sud de Madrid. Symbole du gaspillage économique en Espagne avant la crise, l’aéroport avait été inauguré en décembre 2008 après avoir coûté la bagatelle de 1,1 milliard d'euros, financés par des banques espagnoles et des compagnies aériennes. Première plateforme privée du pays, il affichait alors l’ambition de devenir l'aéroport des low cost desservant le sud de l'Espagne, offrant 2600 m² de terminaux pouvant accueillir jusqu’à 2,5 millions de passagers par an, et la piste d'atterrissage la plus longue d’Europe à 4200 mètres à même de recevoir l’Airbus A380. Mais son ouverture est tombée au moment même où le pays connaissait la pire récession de son histoire. Ciudad Real a accueilli 53.557 passagers en 2009 grâce à Air Nostrum et Air Berlin, sur un total de 3813 vols. Entre janvier et avril 2010, il n'a reçu que 10.301 passagers, soit 44% de moins que sur la même période l’année précédente ; une baisse brutale du trafic qui a entraîné sa liquidation judiciaire en juin, alors même que la low cost Ryanair lançait une liaison depuis Londres – Stansted, la première internationale à Ciudad Real. Autre compagnie à avoir tenté l’aventure, Vueling y avait effectué le dernier vol commercial le 29 octobre 2011 N’ayant depuis accueilli que le tournage d’un film de Pedro Almodovar ou celui de l’émission anglaise Top Gear (avec course de voiture dans le terminal désert), l’aéroport fantôme a donc été mis aux enchères – le repreneur faisant en outre face à une dette de 300 millions d’euros. L’une des rares attractions de la région reste Don Quichotte, qui y pourfendait les moulins… Un autre aéroport semi-privé espagnol, à Castellon au nord de Valence, attend depuis avril 2011 l’arrivée de son premier vol commercial - mais il n’a coûté que 155 millions d’euros, et est situé dans la seule région dépourvue d’aéroport. Prévu pour environ 600 000 passagers par an, il tablait sur la dispute entre Ryanair et Valence – qui a depuis été réglée. Ces deux plateformes ne sont pas des exceptions en Espagne : sur les 47 gérées par AENA (record du continent), une quinzaine accueillent moins de 100 000 passagers par an, et certains sont vides à la basse saison…