Alors que 60% des vols de la compagnie aérienne Air France sont annulés ce mardi, au deuxième jour de la grève des pilotes, le syndicat majoritaire SNPL France ALPA prévoit un possible arrêt complet des opérations dès demain – et explique sa position sur les conditions de développement de la filiale low cost Transavia, au cœur de ses revendications. Après avoir assuré environ un vol sur deux hier, la compagnie nationale française a estimé que seulement 40% des vols seront opérés ce 16 septembre 2014, des retards et annulations de dernière minute n’étant « pas exclues » selon son communiqué d’hier. Des chiffres conformes à ceux du président de la section Air France du SNPL Jean-Louis Barber, qui pense déjà que « ce sera coupé mercredi » (la compagnie donnera ses prévisions à la mi-journée). Alors que les négociations menées lundi n’ont rien donné, le syndicat a publié lundi un point d’étape sur la grève, rappelant au patron du groupe Air France-KLM Alexandre de Juniac que les pilotes « sont passionnés et défendront becs et ongles leurs emplois ». Accusant la direction de rester sourde aux revendications, le SNPL affirme qu’elle lui a présenté un « chantage inacceptable » : « vous acceptez nos conditions, sinon on abandonnera les créneaux d'Orly à la concurrence et on va tous   mourir ». Il rappelle au passage être « favorable au développement de Transavia, mais conteste les conditions dans lesquelles la direction souhaite inscrire ce développement », à commencer par des salaires inférieurs pour les pilotes de la low cost. Dans un long communiqué intitulé « Halte à la désinformation », le SNPL présente sa version de la « réalité » contre celle « distillée dans les médias extérieurs ou au sein d’Air France par la direction ». Transavia c'est de la croissance : faux selon le syndicat, ce n’est que de l’échange d'activité, « la proposition de la direction c'est le développement de Transavia avec les créneaux Air France d'Orly, en parallèle à la diminution de l'activité moyen-courrier AF à Orly ». Il n'y aura aucun transfert de lignes AF vers Transavia : « pourtant, le développement des lignes Transavia se fera bel et bien en partie avec des lignes historiques d'Air France et avec nos créneaux », affirme le syndicat. Transavia c'est de l'emploi pilotes : « c'est surtout un transfert d'emplois pilotes d'AF vers Transavia, avec beaucoup de perte en ligne. Le PDV Pilotes 2014 a d’ailleurs pour objectif 350 nouvelles suppressions d’emplois pilotes AF. 130 dossiers ont été déposés à cette heure. Avec au plus haut 4212 pilotes AF en 2009, nous serons à 3750 en fin d’année 2014. Nous avons donc déjà perdu près de 500 emplois pilotes AF, essentiellement à cause de la baisse d'HdV d’environ 12 % sur CC/MC. Et on nous fait maintenant miroiter 200 emplois pilotes chez Transavia d'ici 3 ans... Même pas de quoi compenser l’objectif du PDV en cours », explique le SNPL. Enfin Transavia c'est un accélérateur de carrière pour les pilotes AF : faux encore, « car nous connaissons surtout une baisse du nombre de passages CDB A320 AF et une baisse d’emplois OPL A320 AF ». air-journal_Transavia_A320 Air FranceAutres arguments contrés par le syndicat, Transavia c'est une promotion pour les OPL et une augmentation de salaire : faux, « car les accords en vigueur chez Transavia prévoient que les passages CDB se font à temps « partiel » (OFF tous les mois d'hiver avec une superbe compensation mensuelle égale à 50 % du fixe) ». Les syndicats pilotes AF maîtriseront le contrat Transavia : non, « la direction veut la suspension du contrat de travail AF durant le passage chez Transavia France, les pilotes passeraient alors sous contrat Transavia ». On retiendra aussi dans cette longue liste le problème de la flotte : selon le SNPL, la direction affirme qu’avec Perform 2020, il y aura de la croissance sur le long courrier, avec l’entrée de 3 Boeing 777 additionnels en 2015 et de quatre en 2016, ainsi que des premiers 787 en 2016 : faux, « le plan de flotte des avions Long Courrier prévoit même une diminution entre 2015 et 2016. L’arrivée de ces avions ne compensera même pas la sortie programmée des 744 et des 340. D’ailleurs, la direction l’admet elle- même, en parlant surtout de “partenariats sur LC” en guise de croissance, sûrement pas au bénéfice des HdV des pilotes d’AF... ». Le syndicat dénonce enfin de fausses négociations, et accuse la direction de « soigneusement omettre de parler dans les médias des futures bases Europe de Transavia, avec des contrats locaux, pour venir attaquer le marché français, dans la plus pure externalisation à la sauce européenne ». Si le SNPL a reçu le soutien du syndicat VNV de KLM, ses explications ne suffiront probablement pas à convaincre le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger, qui l'a jugée indécente. Les personnels au sol de la CFDT « sont exaspérés parce que cela fait deux ans que cette compagnie est en redressement avec des efforts des uns et des autres, et que là les pilotes ne veulent pas y participer », a-t-il affirmé sur RTL. « Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas des questions, des interrogations sur le plan de Transavia, mais ce qui est sûr, c'est que là il y a une grève corporatiste et la CFDT ne la soutient pas et est en désaccord », a-t-il ajouté… Dans le même temps, la concurrence s’organise : après les sièges supplémentaires mis en place par easyJet (et par la SNCF) à Paris, Ryanair propose à ses clients français « d’éviter les grèves d’Air France », offrant ses derniers sièges parmi plusieurs vols à des prix à partir de 69,99 €, pour un voyage au départ des aéroports de Marseille et de Paris-Beauvais (du 16 au 21 septembre). Air Corsica, dont les opérations ne sont pas affectées par la grève (tout comme celles de Hop!), propose aujourd’hui deux rotations en plus à Orly, vers et depuis Ajaccio et Bastia. Et PrivateFly annonce que depuis vendredi dernier, sa plateforme de réservation de jets privés a enregistré une hausse de 60 % dans les recherches de vols en ligne ainsi que dans les réservations de vols supplémentaires effectuées par des passagers dont le vol a été annulé suite à la grève Air France.