La compagnie aérienne low cost Ryanair a proposé une médiation dans le conflit l’opposant à ses pilotes irlandais, qui doivent mener une 5eme grève vendredi en même temps que leurs homologues en Belgique et en Suède. Proposition accueillie favorablement par le syndicat Forsa, mais laissant peu d’espoir d’une suspension du mouvement. En attendant, les pilotes espagnols vont de nouveau en justice contre la low cost, et le prix des billets d’avion de dernière minute est en forte augmentation.

Alors qu’elle était contrainte le 3 juillet 2018 d’annuler 20 des 300 vols prévus entre l’Irlande et la Grande Bretagne, en raison de la quatrième grève d’une partie de ses pilotes basés dans les aéroports irlandais (25% – les 3500 passagers affectés ont été replacés ou remboursés), la spécialiste du vol pas cher a formellement accepté de recourir à un médiateur – comme Forsa le demandait. Kieran Mulvey, ancien membre de la Commission du travail et de la Commission des relations professionnelles, a été proposé par Ryanair, le DRH Eddie Wilson soulignant dans un communiqué que « ses antécédents et son expérience pourraient avoir une influence positive ». Un porte-parole de Forsa a déclaré dans The Independent que cette proposition « faite sans condition préalable est un développement inattendu et positif », tout en soulignant qu’une rencontre avant la grève de vendredi étant « improbable » puisque M. Mulvey ne serait pas disponible avant la semaine prochaine.

Cette ouverture n’a pas empêché Ryanair de relancer ses attaques sur le comportement de Forsa, avec qui deux réunions « de plus de 9 heures » ont eu lieu permettant à la compagnie « d’accepter largement 9 des 11 problèmes liés à l’ancienneté » soulevés par le syndicat – qui selon la low cost « a refusé de s’engager ou d’expliquer ses deux problèmes en suspens, et semble déterminé à susciter un conflit afin de justifier des actions de grève inutiles et répétées ». La proposition le 30 juillet d’une nouvelle rencontre après la grève du 3 aout n’a eu pour réponse qu’un nouveau préavis pour vendredi, rappelle la low cost (Forsa répondait à la menace d’une réduction de voilure à Dublin, avec menaces de transfert vers la Pologne de 300 postes de pilotes et PNC), une « action irresponsable conçue pour causer le maximum de dommages à Ryanair, plus de perturbations et d’inconvénients à ses passagers ». Et de relancer les accusations sur l’ingérence du « pilote d’Aer Lingus Evan Cullen », coupable selon Ryanair d’avoir « au cours des derniers jours cherché à contacter divers et analystes de compagnies aériennes pour discuter plus en détail des problèmes afin d’influencer le cours des actions Ryanair ».

La cinquième grève des pilotes irlandais depuis début juillet devrait donc avoir lieu le 10 aout, jour choisi par les syndicats en Belgique et en Suède pour se mettre en grève et qui pourrait également être adopté par leurs homologues en Allemagne et aux Pays-Bas. En Suède, 22 vols ont d’ores et déjà été annulés préventivement pour la journée de grève du 10 aout. En Belgique, ce sont 104 départs qui sont supprimés, même si une réunion de conciliation est prévue ce lundi ; quelque 20.000 passagers seraient affectés. Ryanair devait assurer environ 2400 vols vendredi prochain.

En Espagne, le syndicat SEPLA a comme en février dernier annoncé s’être porté en justice, cette fois pour dénoncer des « irrégularités » dans les contrats de travail des pilotes basés dans le pays. « La reconnaissance des syndicats et la régularisation de la situation des pilotes ne sont pas incompatibles avec une gestion efficace dans une compagnie à bas coûts », plaide le syndicat dans un communiqué, citant en exemple Norwegian et easyJet qui « emploient leurs pilotes basés en Espagne selon la législation de ce pays ». Pour le SEPLA, Ryanair « opère à la limite de la légalité » avec pour résultat une « concurrence déloyale » ; « nous demandons seulement que nos pilotes aient les mêmes droits et obligations établis par le régulateur espagnol, et la possibilité de négocier de conventions collectives que les autres compagnies aériennes du même secteur », conclut le syndicat. Ryanair n’a pas commenté cette annonce. 

Conséquence des grèves à répétition des pilotes mais aussi des hôtesses de l’air et stewards cet été chez Ryanair, le prix des billets d’avion de dernière minute s’envole chez la concurrence. L’aller simple pour un vol au mois d’aout a augmenté en moyenne de 50 euros, a calculé le président de l’Association irlandaise des agences de voyage Pat Dawson, atteignant par exemple 600 euros pour un aller-retour vers Malaga, et en moyenne 350 à 400 euros vers l’Espagne et le Portugal. « En cas d’incertitude, les autres compagnies aériennes bénéficient des réservations, et quand la demande augmente les prix grimpent », rappelle-t-il, soulignant que 30% des réservations en été sont faites dans la semaine précédant le départ. Le CEO de la compagnie irlandaise Aer Lingus Stephen Kavanagh ne disait pas autre chose la semaine dernière : « tout ce qui fait mal à Ryanair nous fait du bien », tout en relativisant les bénéfices attendus des grèves puisque ses avions sont déjà « bien remplis ».