Les décisions des compagnies aériennes pour la desserte du Japon, dévasté par un tremblement de terre, un tsunami et désormais sous la menace de contamination nucléaire, semblent aussi discordantes que celles de leurs gouvernements nationaux. Si l'on peut généraliser en disant que les Européens fuient quand les Américains patientent, au sein même du vieux continent les transporteurs affichent des décisions qui semblent plus répondre à une pression de l'opinion publique qu'à une logique d'efficacité. Pour une Air France qui augmente ses capacités vers Tokyo, offrant plus de 1000 sièges par jour alors qu'il ne resterait plus que 2000 Français dans la capitale (même si elle affiche des vols pleins vers le Japon), on trouve une Lufthansa qui déroute tous ses vols vers Osaka et Nagoya jusqu'à dimanche (et remplace son Airbus A380 par un A340), une Swiss ou Alitalia qui annulent un vol puis le reprennent – et des British Airways, Finnair ou Virgin Atlantic qui ne changent rien. Lufthansa a d'autre part décidé de vérifier la contamination possible de ses avions à leur arrivée à Francfort, tandis que sa filiale Austrian Airways continuait sa desserte depuis Vienne mais avec un expert militaire en radiations à bord. Seules constances parmi la plupart des compagnies aériennes reliant le Japon à l'Europe: elles facilitent les changements de réservations pour les voyages vers le Japon prévus au mois de mars, et les prix des billets s'envolent parfois de façon vertigineuse en raison de la demande de dernière minute (jusqu'à près de 6000 euros l'aller simple chez British Airways et plus de 8000 chez Lufthansa). Air France, Austrian et Swiss ont également instauré des étapes techniques à Séoul ou Hong Kong pour éviter à leurs équipages d'avoir à dormir à Tokyo. Quelques discordances apparaissent également chez les compagnies asiatiques, Air China annulant des vols entre Tokyo et Pékin ou Shanghai, et la taïwanaise Eva Air suspendant son programme vers Tokyo et Sapporo jusqu'à la fin du mois. Korean Air en revanche a ajouté deux vols quotidiens à partir de mercredi entre Narita et Séoul, et mis en service un Airbus A330-300 vers Haneda (296 sièges au lieu des habituels 149) – tout en offrant une réduction de 50% sur le prix du billet aux Sud-coréens qui veulent rentrer au pays. Pas de changement de programme pour Thai Airways, dont les pilotes ne dormiront plus aux Japon – alors que 70 000 Thaïs auraient déjà annulé leurs voyages vers l'archipel dévasté. La situation apparait beaucoup plus calme du côté des compagnies américaines, qui n'ont pour l'instant pas touché à leur programme de vol à l'exception bien sûr de ceux de Continental Airlines vers l'aéroport de Sendai, dévasté par le tsunami et qui ne devrait par rouvrir avant décembre. Delta Air Lines poursuit ses 60 vols quotidiens vers le Japon et laisse ses équipages dormir sur place, tout comme American Airlines (6 vols par jour) ou United Airlines (17 vols). Pas de changement non plus à Hawaï, relativement épargnée par le tsunami mais qui a pourtant vu le nombre de visiteurs en provenance du Japon chuter brutalement (ils représentent un quart des touristes en moyenne). Delta (3 vols par jour) et Japan Airlines (6 vols par jour) ont même rajoutés des vols ou augmenté leurs capacités vers le Japon. Hawaiian Airlines, qui avait annulé 14 vols vendredi suite à l'alerte locale au tsunami, opère normalement. Pour compliquer le tout, une zone d'exclusion aérienne a été décrétée au dessus de la centrale nucléaire endommagée à Fukushima, et un tremblement de terre ce matin a relancé les spéculations sur une possible éruption du Mont Fuji – le volcan Shinmoedake dans le sud connaissant déjà un regain d'activité…