La FAA aurait identifié après le crash du Boeing 737 MAX 8 de la compagnie aérienne Lion Air la possibilité d’un accident similaire – qui est survenu cinq mois plus tard chez Ethiopian Airlines. La compagnie aérienne China Southern Airlines aurait annulé discrètement sa commande de monocouloirs remotorisés, ayant déjà reçu 24 des 80 exemplaires achetés.

Selon le Wall Street Journal, une analyse interne de la FAA suite à l’accident du vol JT616 de la low cost indonésienne Lion Air le 29 octobre 2018 avait montré qu’il était « fort probable qu’une urgence similaire se produise dans le poste de pilotage quelques mois plus tard », selon un responsable anonyme du régulateur américain. Cette analyse aurait montré qu’il n’en « faudrait pas beaucoup » pour qu’un dysfonctionnement similaire se reproduise. Mais la FAA aurait alors décidé qu’il suffisait de prévenir les pilotes de 737 MAX des possibilités de panne des sondes AOA, qui auraient conduit le logiciel anti-décrochage MCAS à provoquer l’accident. L’agence fédérale avait alors pour objectif de « sortir quelque chose immédiatement, et ensuite exiger quelque chose de plus permanent ». Le 10 mars 2019, le 737 MAX 8 d’Ethiopian Airlines assurant le ET302 s’écrasait dans des circonstances similaires ; les deux crashes ont fait 346 victimes au total, entrainant mi-mars l’immobilisation au sol de tous les MAX en service et l’arrêt des livraisons.

Interrogé par des sénateurs mercredi, Ali Bahrami, haut responsable de la sécurité à la FAA, n’a pas démenti les informations du Wall Street Journal, rappelant la stratégie choisie après le premier crash : « Nous avons estimé que la chose la plus urgente à faire jusqu’à ce que nous ayons mis en place les correctifs appropriés était de fournir aux pilotes les procédures appropriées pour se concentrer sur l’avenir », le temps de mettre au point la mise à jour du MCAS. M. Bahrami a également indiqué que l’agence avait été discrète sur la consigne de navigabilité concernant le MCAS car la procédure standard dans les enquêtes aéronautiques limite ce que les participants, comme la FAA, peuvent dire : « Nous avons donc voulu résoudre le problème sans divulguer des informations que les enquêteurs ne voulaient pas que nous divulguions », a-t-il déclaré. La décision de ne pas informer les pilotes du système MCAS (avant l’entrée en service des MAX) constituait « un équilibre délicat entre fournir suffisamment d’informations pour pouvoir contrôler l’avion et submerger les pilotes de toutes sortes d’informations qui pourraient ne pas être pertinentes », a jouté le dirigeant, le MCAS étant censé « fonctionner en arrière-plan et être transparent pour les pilotes ».

Après la low cost Flyadeal le mois dernier, la compagnie aérienne China Southern Airlines est devenue le deuxième client à renoncer au 737 MAX selon un de ses responsables au Royaume Uni et en Irlande. Dean Saxby a admis lors d’un petit-déjeuner avec la presse mercredi que la compagnie chinoise avait « discrètement annulé sa commande » de monocouloirs remotorisés, 24 MAX 8 ayant été livrés sur les 80 attendus. Selon lui, l’immobilisation forcée des monocouloirs n’a pas eu beaucoup d’impact sur les opérations de la compagnie basée à l’aéroport de Guangzhou-Baiyun, qui gère une flotte de plus de 840 avions – en en attend « beaucoup d’autres dont des Airbus A350 » (19 en attente de livraison sur les 20 achetés). Ni Boeing ni la compagnie aérienne n’ont commenté cette annonce. Le carnet de commandes de CSA compte entre autres 78 A320neo et 24 A321neo supplémentaires (22 et 26 en service respectivement), mais aucune commande supplémentaire n’est évoquée par le responsable.

China Southern Airlines a déjà indiqué qu’elle visait une flotte de mille appareils fin 2020, et le double à l’horizon 2035.

Boeing 737 MAX : risques identifiés très tôt, une commande annulée 1 Air Journal

©Boeing