Le syndicat de pilotes MEC-ALPA de la compagnie aérienne Delta Air Lines a demandé aux autorités de mettre un frein au rapprochement de ses coentreprises transatlantiques avec Air France-KLM et Virgin Atlantic, déçus par l’impact sur l’emploi des accords déjà en vigueur. 

Après l’accord provisoire donné début aout par le DoT à l’élargissement à Virgin Atlantic de la coentreprise transatlantique liant déjà la compagnie américaine et le groupe franco-néerlandais, le syndicat Master Executive Council (MEC) a expliqué dans une plainte officielle qu’ils avaient de « sérieuses inquiétudes » sur la façon dont Delta et Virgin avaient réparti la croissance de leur offre entre les différents équipages depuis 2013. A l’époque, le syndicat explique qu’il avait « exprimé son ferme soutien » à la joint-venture, estimant qu’elle « créerait de nouvelles opportunités de vol pour Delta et ses employés (…) et donc de nouvelles perspectives d’emploi et de carrière aux Etats-Unis, grâce à une offre de services élargie entre les États-Unis et le Royaume-Uni ». Mais près de six ans plus tard, la croissance promise des services entre les États-Unis et le Royaume-Uni « est revenue presque exclusivement à Virgin, et les perspectives d’emploi et de carrière promises aux États-Unis, liées à l’expansion opérationnelle de Delta sur ce marché, ne se sont pas concrétisées », affirme le syndicat pour qui « de fait, les vols exploités par Delta sur le marché critique entre New York à Londres ont en fait diminués » depuis l’entrée en vigueur de leur coentreprise.

Cette utilisation du mécanisme de coentreprise « pour externaliser efficacement les vols de Delta vers un transporteur étranger dont les équipages de conduite travaillent avec des salaires et des règles de travail nettement moins favorables », est selon MEC « fondamentalement incompatible » avec les objectifs d’intérêt général du Département des Transports, qui consistent à « renforcer la position concurrentielle des transporteurs aériens américains par rapport aux transporteurs aériens étrangers, et encourager des salaires et des conditions de travail justes ».

Le syndicat demande donc au DoT d’imposer un « passage en revue intérimaire » fin décembre pour s’assurer que des progrès sont effectivement faits sur l’emploi en conséquence de la nouvelle coentreprise, et d’étendre son examen de ces conséquences au nombre de vols effectivement ajoutés par Delta Air Lines par rapport à ses partenaires. Selon le ministère, le rapprochement des deux coentreprises existantes apportera des « bénéfices additionnel aux passagers comme plus d’options sur les vols vers et depuis l’Europe » ; protégées des lois antitrust, les quatre compagnies aériennes devront rendre compte au DoT tous les ans de leur coopération commerciale, et dans cinq ans présenter un rapport détaillé sur les effets de cette coentreprise élargie.

Le partenariat sur le marché transatlantique, d’une valeur estimée à 13 milliards de dollars entre l’Europe, le Royaume-Uni et l’Amérique du Nord, proposera plus de 300 vols transatlantiques par jour, 108 routes directes et plus de 340 destinations selon les chiffres publiés en mars dernier. Rappelons qu’au terme de l’opération qui devrait être finalisée d’ici la fin de l’année, Air France-KLM fera l’acquisition d’une participation de 31% dans Virgin Atlantic aujourd’hui détenue par Virgin Group, pour un montant de 220 millions de livres ; Virgin Group conservera une participation de 20% ainsi que la présidence de la compagnie britannique, tandis que Delta Air Lines conservera sa participation de 49% (elle détient également 9% d’Air France-KLM).

Air France-KLM présentait le projet en mai 2018 comme permettant à la coentreprise de devenir « le choix privilégié des passagers » voyageant sur l’axe transatlantique « par son réseau large et équilibré, son programme de vols adapté aux besoins, ses tarifs compétitifs et ses avantages réciproques dans le cadre des programmes de fidélité de chacune des compagnies, notamment la possibilité de gagner et échanger des miles sur chacune d’elles ». Les clients pourront également bénéficier de la mutualisation des espaces de chaque compagnie au sein des principaux aéroports, afin d’améliorer les transferts et garantir un accès facilité aux salons des compagnies pour les passagers premium.

Delta : les pilotes méfiants face à la coentreprise avec Air France-KLM et Virgin Atlantic 1 Air Journal

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