La compagnie aérienne Aigle Azur a annoncé hier le retour de son président Frantz Yvelin, après le « coup d’état » de lundi par un des actionnaires. Mais il est accompagné d’un administrateur provisoire nommé par un tribunal de commerce.

Le communiqué de la compagnie française publié le 28 aout 2019, signé par Frantz Yvelin, est brutal : « avec le concours des forces de l’ordre, nous avons pu faire exécuter cette décision de justice » qui met fin à « une situation totalement ubuesque et illégale ». A la demande d’Aigle Azur, le tribunal de commerce d’Evry a en effet nommé la SELARL FHB représentée par Maître Hélène Bourbouloux Administrateur provisoire, et forcé Gérard Houa (propriétaire de Lu Azur, 19% du capital, qui s’était déclaré président lundi) à quitter le siège social. Fin donc selon le président d’une « situation inédite, illicite, et surréaliste, ayant vu deux personnes physiques prétendre avoir le droit de prendre le contrôle de l’entreprise. Dénoncée par 80% de son actionnariat, elle est close ». L’homme d’affaires brésilien David Neeleman (32% du capital) avait en effet dénoncé la manœuvre, avec selon lui le soutien du groupe HNA (49%), niant les pouvoirs que s’étaient accordés Gérard Houa mais aussi Philippe Bohn (entre autres cofondateur et jusqu’en avril dernier directeur général d’Air Sénégal, et nommé lundi nouveau directeur général d’Aigle Azur).

La décision du tribunal, qui intervient pour préserver les intérêts des salariés et de la société en cas de conflit interne, ne met pas pour autant fin à la guerre des actionnaires : des syndicalistes dénoncent déjà une irrégularité judiciaire, Aigle Azur dépendant du tribunal de commerce de Créteil. Certains syndicats sont en effet selon La Tribune « favorables » à Gérard Houa, qui a affirmé avoir réuni 15 millions d’euros pour sauver la compagnie aérienne. Il dénonçait lundi « les errements stratégiques des deux dernières années », expliquant que toutes les solutions explorées jusqu’à présent « ont consisté – au grand détriment des salariés – à brader ses actifs dans une démarche de court terme, sans vision pour l’avenir et sans le réel souci de sauver l’entreprise », dont près de trois quarts des pertes (50 millions d’euros en deux ans selon lui) « sont imputables à l’exploitation de lignes moyen-courriers en Europe ».

Frantz Yvelin, arrivé il y a deux ans à la tête d’Aigle Azur, avait annoncé mi-aout la vente probable à la low cost Vueling des activités de la compagnie au Portugal, accusant les actionnaires de refuser de nouveaux investissements (M. Neeleman et HNA ont en effet leurs propres difficultés financières). Depuis, la compagnie aérienne a lancé des lignes entre sa base à Paris-Orly et les aéroports de Berlin et Milan, aux fréquences désormais réduites, celle reliant Lyon à Nantes étant fermée depuis janvier après moins de trois mois d’existence ; Aigle Azur a aussi suspendu fin juillet pour huit semaines son Marseille – Dakar. Et depuis le début de l’année, elle a lancé des lignes reliant Orly à Kiev et Marseille à Moscou, et signé un partage de codes avec ASL Airlines France sur l’Algérie – un marché qui représente plus de la moitié de son chiffre d’affaires.

Rappelons que l’aventure d’Aigle Azur sur le long-courrier fera aussi les frais des problèmes financiers : les vols vers Sao Paulo-Viracopos, inaugurée en juillet 2018, ne sont plus proposés à partir du 10 septembre. Si cela se confirme, ce sera la fin de son activité long-courrier hors Afrique (Bamako), alors qu’elle espérait encore au printemps relancer des vols vers Pékin (une ligne suspendue à la fin de l’hiver dernier, après six mois d’activité)… Le sort des vols vers Beyrouth n’a pas été annoncé.

Aigle Azur : le président de retour, mais pas tout seul 1 Air Journal

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