Depuis la mi-mars, la compagnie aérienne Air France et sa filiale low cost Transavia ont rapatrié plus de 270.000 Français et étrangers, et l’opération va continuer en particulier depuis l’Afrique du Nord. Le chômage partiel devrait se poursuivre trois mois de plus, tandis que la montée de l’Etat dans son capital est annoncée pour les prochains jours. Deux autres de ses Airbus A380 vont  partir en stockage de longue durée chez Tarmac Aerosave en Espagne.

Il s’agit de « la plus grande opération de rapatriement jamais observée à travers le monde », indiquait hier Air France dans un communiqué : depuis le 14 mars 2020, elle et sa filiale spécialisée dans le vol pas cher ont assuré « plus de 1800 vols au départ de 132 aéroports répartis dans 82 pays, permettant ainsi le rapatriement de plus de 270 000 passagers dont 150 000 ressortissants français ». Dans un contexte économique « fortement dégradé » et alors même que la plupart des avions devaient partir vides de sa base à l’aéroport de Paris-CDG, Air France et Transavia « ont mis en place des tarifs spéciaux et plafonnés pour les voyageurs en rapatriement ».

Ces opérations de rapatriement touchent désormais à leur fin dans la plupart des régions, à l’exception de certaines zones comme l’Afrique du Nord « où la demande reste importante » malgré plus de 200 vols déjà effectués. Pour y répondre, Air France continuera d’assurer « des vols ponctuels » dans les prochaines semaines, sous réserve d’obtention des autorisations nécessaires. Et par exemple depuis Madagascar, un autre vol spécial est programmé pour demain 23 avril, toujours via l’ambassade locale. Rappelons que tous les voyageurs se rendant en métropole doivent disposer d’une attestation de déplacement disponible en téléchargement sur le site du ministère de l’Intérieur.

Air France souligne de nouveau, sans nul doute à l’attention des voyageurs qui s’exaspèrent de ne pas encore avoir pu rentrer, qu’elle « s’est mobilisée et a travaillé en étroite collaboration avec le Ministère des Affaires étrangères et le Secrétariat d’Etat chargé des Transports pour identifier et prioriser les besoins dans les différents pays, en lien avec les ambassades et les représentations d’Air France à travers le monde ». Une cellule de crise opérationnelle 7 jours/7 a été ouverte pour coordonner les opérations et obtenir les autorisations nécessaires au maintien du programme de vols régulier ainsi qu’à la mise en place de vols spéciaux exclusivement dédiés aux opérations de rapatriement. Ces opérations ont été rendues complexes « par les nombreuses restrictions imposées aux compagnies aériennes, en matière par exemple d’hébergement des équipages, et par l’absence d’harmonisation des procédures dans les différents états ».

L’activité de la compagnie de l’alliance SkyTeam se concentre désormais sur l’exécution d’un programme de vols minimum, « équivalent à 5% environ des capacités habituellement offertes ». Celui-ci est destiné d’une part à préserver la continuité territoriale vers de grandes villes françaises et les Outre-mer, et d’autre part à maintenir une ligne de vie avec des grandes métropoles européennes et mondiales, permettant le transport de passagers et de fret. Air France participe par ailleurs activement au pont aérien entre la Chine et la France pour le transport de masques et matériel médical : sept vols sont assurés chaque semaine au moyen de Boeing 777F mais aussi de 777 habituellement utilisés pour le transport de passagers et à bord desquels du matériel est transporté dans les soutes et en cabine. La mise en œuvre de ces plans de rapatriement et de continuité des opérations « a été rendue possible par l’engagement solidaire de l’ensemble des équipes d’Air France et de Transavia, personnels sol, pilotes, hôtesses et stewards, fiers d’apporter leur contribution à l’effort national », souligne la compagnie aérienne.

Concernant les vols commerciaux annulés dû au coronavirus, rappelons que les clients peuvent modifier les dates de leurs billets ou obtenir un avoir valable un an, Air France ne proposant pas de remboursement comptant.

Côté emploi, Air France souhaiterait demander à l’Etat la possibilité d’utiliser le dispositif de chômage partiel jusqu’à neuf mois au lieu de six, selon des sources syndicales citées par BFM TV. Le dispositif initial devait concerner en moyenne 50% du temps de travail « avec un pic possible de 80% » ; la compagnie aérienne souhaiterait faire passer la moyenne à 70%. La demande devrait être présentée officiellement lors du CSE central de jeudi. « Augmenter le chômage partiel permet d’avoir de la flexibilité », a déclaré à l’AFP Farid Slimani, secrétaire général adjoint du syndicat UNSA-Aérien Air France, en évoquant la « survie de l’entreprise », tandis que chez SUD-Aérien on demandait un maintien de salaire pour les plus bas revenus. Le chômage partiel permet à l’entreprise d’être indemnisée à hauteur de 70% du salaire brut et 84% du salaire net, la compagnie aérienne étant libre de compléter les revenus de ses employés.

Evoquée pour « les prochains jours » depuis le début du mois, la montée de l’Etat dans le capital d’Air France aura lieu – « dans les prochains jours », a répété hier devant les sénateurs le ministre de l’Economie Bruno Le Maire. Les détails du plan de soutien massif promis par le gouvernement français à la compagnie aérienne ne sont toujours pas connus, mais un deuxième projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2020 est en voie d’être adopté, qui fera passer les aides d’Etat de 40 à 110 milliards d’euros (un troisième serait déjà dans les cartons). Une nouvelle enveloppe de 20 milliards concerne en particulier les « grandes entreprises stratégiques », dont elle fait partie. Rappelons que le groupe Air France-KLM perd 25 millions d’euros par jour, et a demandé une injection de fonds rapide en plus des emprunts pour 6 milliards d’euros négociés avec les Etats français et néerlandais. Ce dernier montant ne serait qu’un minimum, répondant aux critères d’aides d’état fixés par Bruxelles : l’argent recherché tournerait désormais autour des dix milliards d’euros dont 8 pour la seule Air France, selon les informations de La Tribune citant des sources internes au groupe. Qui n’a pas commenté l’information.

On retiendra aussi les déclarations de la ministre de la Transition écologique et solidaire Élisabeth Borne hier sur RTL, selon qui les frontières de l’espace Schengen « ne rouvriront pas dans l’immédiat », Et elle a de nouveau appelé les Français à ne pas réserver leurs vacances d’été « dans l’immédiat » : « nous sommes face à une situation sanitaire évolutive, je ne vais pas vous dire aujourd’hui ce qu’il va se passer en juillet », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’à ce jour partir « aux États-Unis ou en Asie ne semble pas raisonnable ». La priorité du gouvernement est de permettre que l’activité reprenne au mieux à partir du 11 mai, et elle demande donc aux Français « de patienter un petit peu pour réserver des vacances ».

Enfin deux Airbus A380 d’Air France partent aujourd’hui en stockage chez Tarmac Aerosave à Teruel en Espagne : il s’agit des F-HPJF et F-HPJG selon The Travellers Club, leurs équipages devant rentrer à Roissy en A318 (F-GUGE). Les F-HPJC, F-HPJA et F-HPJE seront eux stationnés à Tarbes, toujours chez Tarmac Aerospace. Les 180 de ses 224 avions cloués au sol sont aussi stockés à Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, et Toulouse Blagnac, où Air France possède une base de maintenance.

Air France : 270.000 rapatriés, capital et parking A380 2 Air Journal

©Air France