La nouvelle administration américaine pourrait remettre en cause plusieurs contrats de ventes d’avions par Boeing au Moyen-Orient, et particulièrement en Iran. Certains analystes estiment à 20 milliards de dollars le coût potentiel des décisions de Donald Trump. Avant même son élection, M. Trump avait remis en cause l’accord sur le nucléaire avec l’Iran, qui avait permis la levée de certaines sanctions et donc la signature par Boeing d’un contrat non encore finalisé avec Iran Air portant sur 80 avions : cinquante 737 MAX 8, quinze 777-300ER et quinze 777-9X, pour un montant estimé à 16 milliards de dollars au prix catalogue (probablement plus proche de la moitié en réalité). « Des dizaines de milliers de salariés » sont directement associés à la production et la livraison des 777-300ER, ainsi que « près de 100.000 emplois américains dans l’industrie aéronautique », rappelait Boeing en décembre, ses plus de 13.600 fournisseurs répartis dans les 50 états américains employant plus d’un million et demi de personnes. Mais la signature vendredi par Donald Trump d’un décret bloquant pour trois mois l’entrée aux Etats-Unis des ressortissants de sept pays majoritairement musulmans, dont l’Iran justement, un problème supplémentaire se poser pour l’avionneur : les pilotes, PNC et mécaniciens iraniens ne peuvent plus venir se former dans ses installations. Tous les analystes interrogés par exemple par le Seattle Times doutent que des exceptions soient accordées au personnel d’Iran Air afin de soutenir le contrat de Boeing ; ils tablent plus sur de nouvelles sanctions imposées à Téhéran. Et tant pis pour les lignes d’assemblage des 777 à Everett, où la commande d’Iran Air aurait permis de modérer la baisse de production annoncée. Un ancien vice-président de Boeing d’origine iranienne, Mohammad Yahyavi, reconnait dans le quotidien que la situation est « très dure » pour l’avionneur, coincé entre l’accord avec un client et la politique du gouvernement : mais « cette dernière aura le dernier mot », prédit l’homme qui soutient la fermeture temporaire des frontières.  Boeing s’en tient de son côté à un discours minimaliste sur le sujet afin de ne froisser aucune partie, un porte-parole déclarant hier : « nous continuons à évaluer les potentiels impacts de l'ordre exécutif, et suivons de près les actions du Congrès, de l'administration et du judiciaire ». Un vice-président en service résumait de son côté : « nous devons être patients » avec le gouvernement, avec qui Boeing a aussi des contrats d’armement… L’Iran n’est pas la seule cible du décret ayant des implications sur les ventes d’avions : en Irak, Boeing doit encore livrer 18 737-800 et dix 787-8 Dreamliner à Iraqi Airways sur les 40 appareils commandés en 2008. Le premier des 13 monocouloirs livrés depuis la signature du contrat était arrivé à l’aéroport de Bagdad en aout 2013 ; mais pendant les trois mois à venir, plus aucun pilote irakien ne peut venir prendre livraison des avions en attente de livraisons – et Boeing ne peut donc pas être payé… Si les deux compagnies du Moyen-Orient représentent un problème immédiat pour l'avionneur américain, à plus long terme sa présence en Chine pourrait aussi subir des contrecoups : Donald Trump a fait du pays une cible de ses menaces sur le commerce mondial.