Les contrôleurs aériens d’Aix en Provence seront de nouveau en grève ce weekend, entrainant des annulations de vols et des retards dans les aéroports du sud-est de la France comme c’est le cas depuis des semaines. Selon Ryanair, l’augmentation des arrêts de travail chez les aiguilleurs du ciel européens est de 300% par rapport à l’année dernière.

L’aéroport de Marseille-Provence a prévenu les voyageurs : en raison d’un mouvement social du contrôle aérien, des perturbations sont à prévoir le 23 et 24 juin 2018. « D’importants retards et de possibles annulations de vols peuvent survenir. Nous vous recommandons de contacter votre compagnie aérienne afin de vérifier le maintien de votre vol ». Comme les précédents weekends, le syndicat UNSA ICNA majoritaire au CRNA d’Aix-en-Provence (Centre régional de la navigation aérienne) est à l’origine de la grève. Il déclare dans un communiqué que « force est de constater qu’après une dizaine de réunions de conciliation, les négociations avec la Direction des Services de la Navigation aérienne et la Direction des Opérations sont dans l’impasse ». Ses revendications portent sur l’organisation du travail : « le désaccord est profond et persistant sur les propositions échangées. L’UNSA ICNA refuse de rentrer dans une surenchère de la contrainte et de s’inscrire dans une organisation de travail alternative associée à une rémunération en inadéquation avec le niveau de performance apporté ».

Le préavis de grève déposé pour le weekend du 30 juin-1er juillet est lui aussi maintenu par l’UNSA ICNA.

Alors que la situation du contrôle aérien a fait l’objet d’un rapport du Sénat plutôt apprécié par le syndicat majoritaire SNCTA, ce nouvel arrêt de travail des aiguilleurs du ciel français fait bondir la compagnie aérienne low cost Ryanair : elle annonce une augmentation de 300% par rapport à 2017 des grèves du contrôle aérien en Europe. Depuis le début de l’année, les compagnies membres de l’A4E (l’association Airlines for Europe) ont été « contraintes d’annuler près de 5000 vols à la suite des grèves, touchant directement environ 784.000 passagers à travers l’Europe. De plus, des millions de voyageurs ont été affectés par des retards de vol causés par des déroutements » pour éviter l’espace aérien affecté et par l’accumulation des retards. Ryanair cite aussi Eurocontrol, pour qui 39.000 vols – soit environ 30% du total des retards de vols en mai – ont été retardés en raison des grèves du contrôle aérien ; le mois dernier, « les 56.000 retards de plus de 15 minutes comptabilisés sont quatre fois plus nombreux qu’en mai 2017 ». Selon une étude de PWC, l’impact prévu de ces grèves sur l’économie de l’Union européenne atteint 13,4 milliards d’euros entre 2010 et 2017 et « ne fait que croitre ».

Ces grèves « ont un impact coûteux sur les clients, les économies européennes et l’environnement », et selon Ryanair « violent le principe de permettre aux personnes et aux biens de circuler librement à travers l’Europe », car :
1. Les déplacements des clients et les chaînes d’approvisionnement sont gravement perturbés.
2. Les déroutements pour éviter l’espace aérien fermé entraînent des vols beaucoup plus longs utilisant plus de carburant et entraînant des émissions de CO2 plus élevées.
3. Le tourisme est le plus touché en raison des vols annulés vers les principales destinations de vacances, mettant en danger les petites et moyennes entreprises.
4. Les compagnies aériennes doivent payer aux passagers une indemnisation pour les retards et les réattribuer sur d’autres vols, perturbant de manière significative les plans de voyage des clients et les opérations des compagnies aériennes. Les compagnies aériennes n’ont pas le droit de recouvrer ces coûts auprès des organisations du contrôle aérien qui les ont causées.

L’été dernier, la Commission européenne avait comptabilisé depuis 2005 environ 357 grèves dans le contrôle aérien dans l’UE, dont 254 en France. Willie Walsh, directeur général du groupe IAG (British Airways, Aer Lingus, Iberia, Vueling et Level), a déclaré: « IAG et Ryanair envisagent de déposer une plainte auprès de la Commission européenne, car les grèves du CTA représentent le plus grand défi pour notre industrie. Ils détruisent le trafic aérien européen et ont un impact énorme sur les consommateurs. C’est une cause de perturbation très frustrante qui affecte toutes les compagnies aériennes, mais qui a notamment un impact négatif important sur le tourisme et l’économie espagnols. Les grèves continues du personnel à Marseille ont un impact disproportionné sur les compagnies aériennes qui partent de Barcelone, puisqu’ils contrôlent les vols au-dessus de la majeure partie de l’espace aérien méditerranéen. Pour Vueling, cela signifie que 50% de ses vols sont affectés ». Le CEO de Ryanair Michael O’Leary a ajouté : « Les fournisseurs du CTA en Europe approchent de l’implosion avec des centaines de vols annulés chaque jour soit à cause des grèves, soit parce que le contrôle aérien européen manque de personnel. La situation est particulièrement aiguë les week-ends où les fournisseurs britanniques et allemands se cachent derrière des conditions météorologiques défavorables et des euphémismes tels que les «restrictions de capacité», sans tenir compte suffisamment du nombre de vols prévus. Des mesures urgentes doivent maintenant être prises par les gouvernements britannique et allemand et la Commission européenne, sinon des milliers d’autres vols et des millions de passagers seront perturbés, en particulier durant les mois de juillet et août, si cette crise n’est pas résolue ».

A4E a proposé une période de préavis obligatoire de 72 heures pour les employés du CTA qui souhaitent faire grève, la protection des survols tout en veillant à ce qu’elle ne se fasse pas au détriment des services locaux, et une garantie sur les services minimums. La plainte de Ryanair et IAG « soutiendra qu’en ne protégeant pas adéquatement les vols au-dessus de la France, la loi européenne est violée. Nous avons travaillé de manière constructive et très intensive au cours des derniers mois avec des fonctionnaires du gouvernement français et des parlementaires pour établir une solution stable et à long terme à ces perturbations. Dans ce contexte, nous exhortons le gouvernement français à prendre des mesures décisives pour résoudre ce problème au nom de tous nos passagers, en prévision de la saison touristique de l’été », a déclaré Thomas Reynaert, directeur général d’A4E. Les consommateurs peuvent également exiger une action plus rapide des politiciens de l’UE en signant sa pétition en ligne ; elle sera présentée aux autorités compétentes à Bruxelles et dans les capitales européennes d’ici à la fin de 2018.

Contrôle aérien : nouvelle grève ce weekend dans le sud-est 1 Air Journal