Le Congrès américain a auditionné des familles de victimes du crash du vol ET302 de la compagnie aérienne Ethiopian Airlines, un des deux accidents en cinq mois impliquant les Boeing 737 MAX et qui ont fait 346 victimes au total. United Airlines va acheter des 737-700 d’occasion, se demandant si les livraisons des monocouloirs remotorisés redémarreront bien en décembre comme désormais espéré. Boeing de son côté versera prochainement 50 millions de dollars sur les 100 promis au titre de l’aide financière à court terme aux familles des victimes des accidents des vols JT610 de Lion Air et ET302 d’Ethiopian Airlines.

Auditionnés le 17 juillet 2019 par le sous-comité de l’aviation de la Chambre des Représentants  à Washington, des membres des familles de passagers morts dans l’accident du 737 MAX 8 de la compagnie nationale éthiopienne en mars dernier (157 morts) ont surtout dénoncé le comportement de l’avionneur. Pour Paul Njoroge, qui a perdu dans le crash du vol ET302 sa femme, sa belle-mère et ses trois enfants, les actions de Boeing dont « honteuses » et « une insulte à l’humanité ». Et d’accuser : ils étaient « au courant des défauts (après l’accident du MAX 8 de Lion Air en octobre NDLR), c’est pour ça qu’ils ont caché l’existence du système », le MCAS anti-décrochage impliqué dans les deux accidents. Boeing a selon le résident canadien né au Kenya blâmé « des pilotes étrangers innocents qui ne savaient rien et qui ne disposaient d’aucune information » sur le nouveau système.

Les familles ont également demandé au Congrès une recertification complète des 737 MAX « en tant qu’avion nouveau », et exigé une formation obligatoire sur simulateur des pilotes une fois que la mise à jour logicielle du MCAS aura été menée à bien. La Federal Aviation Administration (FAA) devrait selon elles revenir au système de représentant technique désigné (DER), au lieu de l’autorisation de désignation de l’organisation (ODA) mise en place depuis 2005. Principalement pour des raisons budgétaires, mais qui a nourri les soupçons de conflit d’intérêt dans la certification des Boeing. Michael Stumo, père d’une victime du vol ET302, a rappelé : dans l’ancien programme DER, Boeing « payait toujours ces ingénieurs, mais ils relevaient de la FAA. Il y avait deux lignes d’autorité, deux chaînes de commandement ; la culture de la sécurité pouvait mettre un terme aux choses si ça semblait mal se passer ».

Boeing 737 MAX : accusations, interrogations et compensations 1 Air Journal

©United Airlines

Côté clients, United Airlines a mis en doute la capacité de Boeing à reprendre les livraisons de 737 MAX d’ici la fin de l’année. La compagnie américaine, qui avait mis en service 14 Boeing 737 MAX 9 (sur 35 commandés, plus 100 MAX 8) avant leur immobilisation au sol en mars, devait en recevoir seize cette année. Selon le directeur financier Gerry Laderman, « aucun client de Boeing ne sait exactement quand les livraisons reprendront. Mais on peut assumer que les retards de livraison ne seront pas résorbés avant l’année prochaine ». United Airlines a déjà reporté à début novembre au plus tôt le retour en service de ses monocouloirs remotorisés. Et pour compenser le manque de capacité, a annoncé hier l’achet de 19 Boeing 737-700 d’occasion, livrables à partir de décembre. Sans préciser leur provenance, ni leur coût – qui sera probablement réclamé à Boeing. Ses propres 737-700 peuvent accueillir 126 passagers, contre 179 dans les MAX 9 ; ils ne les remplaceront pas, mais aideront la compagnie aérienne à atteindre les 3% à 4% de croissance prévue cette année.

Boeing a de son côté annoncé hier qu’il allait consacrer la moitié des 100 millions de dollars promis au titre de l’aide financière à court terme aux familles des victimes des vols Lion Air 610 et Ethiopian Airlines 302. Cette somme de 50 millions de dollars « représente la première partie des 100 millions de dollars que Boeing s’est engagé à verser afin de répondre aux besoins des familles et des communautés touchées par ces deux accidents », précise son communiqué ; elle sera versée « indépendamment de toute indemnisation obtenue par voie judiciaire ». À cet effet, Boeing a également chargé Kenneth Feinberg et Camille Biros, experts américains spécialisés dans la création et la gestion des fonds d’indemnisation des victimes, d’assurer la mise en place et l’administration de ce fonds. Mme Biros a déclaré : « Nous savons combien il est important d’aider les familles des victimes qui ont vécu une tragédie personnelle, et nous mettrons tout en œuvre pour concevoir et administrer ce fonds en vue de distribuer les sommes annoncées aussi efficacement et aussi rapidement que possible ». Les nombreuses vies perdues dans les deux accidents « continuent de peser lourdement sur tous les employés de Boeing, et nous ressentons une profonde tristesse pour les parents et les proches de toutes les personnes qui étaient à bord », a ajouté Dennis Muilenburg, Président-directeur général de Boeing.

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