Airbus va demander une évaluation juridique indépendante pour résoudre son différent avec la compagnie aérienne Qatar Airways, qui a cloué au sol des A350 pour cause de problème de peinture.

Sans jamais citer la compagnie nationale qatarie, l’avionneur européen a publié le 9 décembre 2021 un communiqué « face à la méconnaissance actuelle de la dégradation de surface non structurelle de sa flotte d’avions A350 par l’un de ses clients ». Il est « devenu nécessaire pour Airbus de demander une évaluation juridique indépendante comme voie à suivre pour résoudre le différend, que les deux parties n’ont pu régler au cours de discussions directes et ouvertes ». La sécurité « est la priorité absolue d’Airbus. Les résultats liés à la peinture de surface ont été soigneusement évalués par Airbus et confirmés par l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) comme n’ayant aucun impact sur la navigabilité de la flotte A350. La tentative de ce client de déformer ce sujet spécifique comme un problème de navigabilité représente une menace pour les protocoles internationaux sur les questions de sécurité ».

Si Airbus « regrette la nécessité de suivre une telle voie, il est devenu nécessaire de défendre sa position et sa réputation. Airbus a travaillé activement avec ses clients afin de minimiser l’impact et les désagréments causés par cette dégradation de surface en service sur l’avion. Ces solutions ont toutes été rejetées par le client susmentionné sans justification légitime » (d’autres compagnies aériennes ont été affectées par le problème « cosmétique », qui dans certains cas avait laissé apparaître le treillis conçu pour absorber la foudre).

Selon son constructeur, l’A350 « fonctionne bien en service avec une fiabilité opérationnelle de 99,5% et s’est avéré être un symbole de résilience dans la crise Covid-19. Il permet aux grandes compagnies aériennes du monde entier de redémarrer leurs opérations internationales, de reconnecter et d’unir à nouveau les nations et les continents, alors que le monde émerge lentement de la pandémie ».

En parallèle, Airbus s’emploie à « rétablir un dialogue constructif avec son client sur ce sujet, mais n’est pas disposé à accepter que des déclarations inexactes de ce genre perdurent ». Lors d’une conférence de presse téléphone rapportée par Le Figaro, le vice-président exécutif des programmes et des services d’Airbus Philippe Mhun a déclaré que les contrats commerciaux avec Qatar Airways prévoyaient « une telle éventualité » de recours aux avocats, mais n’a pas fourni plus de détail sur la procédure à venir. Il a en revanche souligné que la décision de faire cette annonce publique répondait au fait que Qatar Airways a déjà « franchi la première étape d’une procédure judiciaire ».

En aout dernier, le régulateur qatari avait selon la compagnie aérienne ordonné en raison en raison d’un problème de « dégradation accélérée de la surface sous la peinture » l’immobilisation au sol de treize A350 (onze -900 et deux -1000 ; une vingtaine le sont actuellement, dont le A7-ALL où le problème avait été identifié dès janvier). Le CEO du Groupe Qatar Airways Akbar Al Baker déclarait alors : « avec ce dernier développement, nous espérons sincèrement qu’Airbus traite cette affaire avec toute l’attention qu’elle requiert. Qatar Airways n’acceptera que des avions pouvant offrir à ses passagers le plus haut niveau de sécurité et la meilleure expérience de voyage possible. Qatar Airways attend d’Airbus que soit établie la cause primaire et qu’elle soit corrigée de manière permanente, afin que notre compagnie et notre organisme de réglementation soient pleinement satisfaits des conditions, avant de prendre livraison de tout autre appareil A350 ».

Cette suspension des livraisons (23 A350-1000 sont encore attendus) avait été mentionnée dès le début juin ; certains analystes parlaient alors d’un coup de bluff public pour justifier les reports annoncés dès septembre 2020 en raison de la pandémie de Covid-19, un « problème » pouvant en effet jouer dans les discussions sur d’éventuelles pénalités si les nouveaux avions ne sont pas réceptionnés comme prévu. Le cas des 50 A321neo (dont dix en version LR) attendus à partir de l’année prochaine n’a jamais été évoqué.

Le patron de Qatar Airways a été particulièrement cinglant ces derniers mois envers Airbus, dont il qualifie aussi l’A380 de sa « plus grande erreur » (même s’il est contraint de les remettre en service). « Nous avons un problème avec Airbus que nous devons régler », expliquait-il début juin, soulignant que faute de solution cela pourrait « tendre les relations » entre le constructeur et la compagnie de l’alliance Oneworld mais aussi « IAG, LATAM et d’autres transporteurs dont nous sommes actionnaires ». Et il a récemment promis de ne pas commander d’A350F, le nouvel avion cargo d’Airbus.

Airbus a d’autre part rappelé hier que les récentes mesures correctives proposées par l’EASA pour cause de zones de feuille de cuivre expansée (ECF) manquante sur les ailes de treize A350 « à la suite d’un processus de production, qui a depuis été adapté », sont de nature différente. Le nombre limité d’avions « sera inspecté conformément à la directive de l’EASA ».

Peinture de l’A350 : Airbus prêt à aller en arbitrage 1 Air Journal

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