Boeing a demandé au gouvernement américain l’ouverture d’une enquête contre son concurrent canadien Bombardier, soupçonné d’avoir perçu des aides d’état illégales pour soutenir le programme CSeries. Bombardier et le Canada protestent. Boeing précise dans son communiqué du 27 avril 2017 avoir demandé au département du Commerce d’enquêter, et à l’agence fédérale International Trade Commission (USITC) d’imposer des taxes anti-dumping et de contreparties sur les nouveaux monocouloirs de 100 à 150 places de Bombardier. Ce dernier est accusé de s’être lancé « dans une campagne agressive pour vendre ses avions CSeries sur le marché américain à des prix ridiculement bas, moins de 20 millions de dollars pour des engins qui coutent 33 millions de dollars à produire selon des informations publiquement disponibles ». Le CS100 coûte 79,5 millions de dollars et le CS300 89,5 millions de dollars au prix catalogue. Ce dumping n’aurait selon Boeing pas été possible sans les aides versées par le Canada, qui s’élèveraient désormais à plus de trois milliards de dollars.  La compagnie aérienne Delta Air Lines est directement concernée par l’affaire, elle qui avait commandé ferme 75 Bombardier CS100 en avril 2016 pour un montant de 5,6 milliards de dollars au prix catalogue. Un prix jamais payé puisque les clients obtiennent des rabais plus ou moins importants en fonction du montant de la commande, et ce quelque soit l’avionneur. Rappelons que le CS300 est un concurrent direct des Boeing 737-700 et MAX 7, ainsi que des Airbus A319 et A319neo. Le président de Bombardier Alain Bellemare évoquait d’ailleurs à l’occasion de la commande de Delta un combat « extrêmement âpre » puisque les trois avionneurs étaient en lice (Airbus avait vendu le lendemain 37 A321 à Delta). Parmi les autres clients américains des CSeries figurent aussi la société de leasing Air Lease Corp. (20) et Republic Airlines – mais cette dernière est en faillite. Bombardier « structure ses opérations commerciales de façon à s'assurer du respect des lois et règlements des juridictions dans lesquelles nous exerçons nos activités, y compris dans les cas soulevés par Boeing », a réagi hier l’avionneur canadien, tandis que le gouvernement affirmait « préparer une vigoureuse contestation de ces allégations » afin de défendre « avec fermeté les emplois de l'industrie de l'aérospatiale des deux côtés de la frontière ». Rappelons qu'en février dernier, la Canada avait annoncé l’octroi de 372,5 millions de dollars à Bombardier sous la forme de contributions remboursables, les fonds versés pour quatre ans devant permettre de financer « les activités de recherche-développement liées à l’avion d’affaires Global 7000 ainsi que les activités continues menées pour la mise au point des CSeries ». Dès mai 2005, le gouvernement avait annoncé son premier appui au programme CSeries, sous la forme d’une contribution remboursable de 350 millions de dollars. Et le 11 octobre 2016, il y avait ajouté un investissement pouvant atteindre 54 millions de dollars au titre du Programme de démonstration de technologies pour appuyer un consortium dirigé par Bombardier. Enfin en novembre 2016, le gouvernement provincial du Québec avait annoncé en novembre dernier un investissement d’un milliard de dollars dans une société en commandite (SEC) dans laquelle Bombardier est majoritaire, afin de l’aider à « poursuivre les activités de conception, de fabrication et de commercialisation » des CS100 et CS300. Bombardier a en outre souligné qu’il employait environ 7000 salariés aux Etats-Unis, « dans des dizaines d’installations » réparties dans 17 Etats. L’avionneur affirme que ses achats se montent à environ 3 milliards de dollars chaque année chez des sous-traitants dans 48 Etats américains. Rappelons que les CS100 sont entré en service chez Swiss International Airlines, et les CS300 chez airBaltic.