Le ministre de l’Economie français estime que les conditions demandées par Bruxelles pour la recapitalisation  de la compagnie aérienne Air France doivent être « soutenables, en particulier sur la demande de cessions de créneaux de vols au seul aéroport de Paris-Orly.

Après s’être entretenu avec le commissaire européen Thierry Breton, Bruno Le Maire a rappelé le 15 février 2021 la position de l’Etat français mais aussi des syndicats ou du CEO du groupe Air France-KLM. Alors que la compagnie nationale française devrait dévoiler jeudi une perte annuelle d’environ 7 milliards d’euros, et qu’elle continuerait de « bruler » 10 millions par jour, les exigences de la Commission européenne pour donner son feu vert à la recapitalisation doivent « évidemment » être « soutenables ». « Nous comprenons parfaitement qu’il faille des remèdes », a expliqué le ministre, évoquant sans le nommer les contreparties demandées au groupe Lufthansa l’année dernière.

L’Europe avait obtenu du groupe allemand la cession à Francfort et Munich de 24 créneaux de vol, soit 12 rotations par jour, dans chaque aéroport (où elle est largement majoritaire en parts de marché). Et c’est ce même nombre de créneaux qui serait demandée à Air France, selon les informations révélées par La Tribune début février, mais dans le seul aéroport de Paris-Orly : soit l’équivalent de 8700 rotations par an – ou 7% des quelque 125.000 créneaux actuellement détenus par la compagnie française. Sa compagnie-sœur KLM Royal Dutch Airlines ferait face aux mêmes exigences de la Commission européenne dans le très saturé aéroport d’Amsterdam-Schiphol, expliquait le quotidien. 

Accueillie par un tollé dans l’hexagone, la demande de Bruxelles avait déjà la semaine dernière fait l’objet d’une opposition farouche du ministre délégué aux transports Jean-Baptiste Djebbari : « il est hors de question que le groupe Air France-KLM, du fait de la recapitalisation, se retrouve grevé en compétitivité et se fragilise du fait d’une négociation qui ne serait pas équilibrée ». Cet équilibre est toujours recherché, les négociations entre Paris et Bruxelles se poursuivant en coulisses.

Rappelons que d’après le gendarme européen de la concurrence, tout Etat voulant « apporter une aide de recapitalisation d’un montant supérieur à 250 millions d’euros à une entreprise très puissante sur les marchés sur lesquelles elle opère » doit proposer « des mesures supplémentaires pour préserver une concurrence efficace ».

Même sans l’intervention de l’Europe, le sujet de la recapitalisation du groupe entraine déjà des tensions entre Paris et La Haye. Selon la presse néerlandaise, les Pays-Bas souhaitent une injection de capital au niveau de leur compagnie nationale et non au niveau de groupe Air France-KLM. Une stratégie opposée à celle de Paris, où le principe de la recapitalisation, évoqué depuis l’automne dernier (sans pour autant atteindre une renationalisation d’Air France) vise à « restaurer la capacité du groupe à faire face » à la période post-pandémie de Covid-19 – via un apport de 4 à 5 milliards d’euros qui ferait monter sa part du capital de 14% à environ 30%.

Le gouvernement français met en avant le fait que toute aide à Air France-KLM profiterait automatiquement à la compagnie néerlandaise, mais apparemment sans effet – la partie opposée craignant que tout investissement au niveau du groupe disparaisse dans les caisses d’Air France.

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Recapitalisation d’Air France : des contreparties soutenables ? 1 Air Journal

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