Le patron de la compagnie aérienne Emirates Airlines affirme être prêt à annuler sa commande de Boeing 777X si la certification est reportée au-delà de 2023. Et il émet des doutes sur la livraison attendue de trente 787-9 Dreamliner.

Meilleur client du dernier gros-porteur de l’avionneur américain avec 115 777-9 commandés, Tim Clark a proféré sa menace lors d’un entretien exclusif accordé à Airlineratings : la compagnie émiratie basée à l’aéroport de Dubaï a précisé que « douze 777-9 ont déjà été assemblés et sont entreposés sans moteurs », mais en l’attente des décisions de la FAA et de l’EASA, son président « n’a tout simplement pas de visibilité » sur leur entrée en service là-dessus. A la demande posée à Boeing si le 777-9 initialement annoncé pour avril 2020 était en bonne voie pour être certifié d’ici juillet 2023, l’avionneur aurait répondu « oui, au conditionnel » ; « s’ils ont de la chance, ils l’obtiendront, sinon, cela durera encore six mois ou un an ».

L’incertitude ne peut pas durer, estime Tim Clark : « honnêtement, si ça va au-delà de 2023 et que ça dure encore un an, on annule probablement le programme ». Avant de souligner qu’il ne souhaite pas en arriver jusque là « car il n’y a nulle part ailleurs où nous pourrions aller » : Boeing construit « le plus gros avion et nous le voulons. Cela a été fait à notre demande en 2010, je ne veux même pas imaginer que cela ne se produise pas ». 

Et si Boeing tient son calendrier en 2023, reste encore le problème des livraisons : le programme de production laisserait un trou après les douze premiers 777-9, et Tim Clark aurait obtenu du constructeur qu’il passe de zéro livraison en 2024 à « trois à cinq ».

Face aux retards du 777X, Emirates Airlines a donc commencé à organiser la prolongation de la durée de vie des avions actuellement opérés, « environ 120 » étant concernés « dont 80 Airbus A380 et 40 Boeing 777-300ER », estime Tim Clark qui resteraient en service « de 6 à 10 ans supplémentaires ». Le premier superjumbo sorti de flotte (A6-EDA, en 2020) n’avait que 13 ans, rappelle-t-il : « l’A380 est conçu pour 19.000 cycles, et nous devons persuader Airbus de prolonger leur durée de vie à 25.000, voire 30.000 cycles. Je suis sûr qu’il n’y aura pas de problème avec les régulateurs ». Six autres superjumbos ont été livrés à Emirates, et en les maintenant 15 ans « nous sommes de toute façon au milieu des années 2030 ». Les autres avions déjà mis hors service « ne se sont pas approchés de leur limite [de durée de vie]. Et je suis sûr qu’il n’y aura pas d’obstacles techniques pour le faire ».

Emirates Airlines ne se fait guère non plus d’illusions sur les trente 787-9 Dreamliner commandés prévus initialement pour des livraisons à partir de mai l’année prochaine : « cela n’arrivera pas », juge Tim Clark en évoquant « l’énorme carnet de commandes », le ralentissement de la production – et la suspension des livraisons suite à la découverte de problèmes de production.

Boeing compte venir à Dubaï cet été pour des essais « dans des conditions chaudes et poussiéreuses », a rappelé Tim Clark, qui compte à cette occasion soumettre les moteurs GE9X à des tests très stricts (« niveaux de poussée élevés à la masse maximale au décollage dans la poussière et la chaleur à des altitudes à basse pression que nous avons en été »). Pour lui, « tout cela avance et je suppose que nous y arriverons ».

Mais c’est aussi l’avenir à plus long terme qui l’intéresse, notamment quand les deux aéroports de Dubaï (DXB et DWC) pourront accueillir 150 millions de passagers par an (contre 88 millions en 2019) : ni Airbus ni Boeing ne proposent de remplaçant à l’A380, et « les avions à hydrogène ne seront sûrement pas la solution » pour les gros porteurs…

777X : Emirates pourrait annuler sa commande en cas de nouveau retard 1 Air Journal

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777X : Emirates pourrait annuler sa commande en cas de nouveau retard 2 Air Journal

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