La Commission Européenne menace « d’arrêter les pendules » dans son enquête sur la prise de contrôle d’Embraer par Boeing si les deux parties ne lui fournissent pas les documents nécessaires dans les temps.

Ouverte le mois dernier par la CE pour qui l’opération pourrait nuire à la concurrence et faire monter les prix, l’enquête approfondie sur le projet de prise de contrôle par le constructeur américain Boeing des activités d’aéronautique civile du groupe brésilien Embraer pourrait être suspendue – et donc son résultat retardé d’autant. Un porte-parole de la CE a expliqué à Bloomberg que les deux parties « doivent fournir dans les temps les informations nécessaires à l’enquête », faute de quoi cette dernière sera suspendue (et pourra recommencer une fois les documents reçus).  

Selon la Commission européenne, l’acquisition de 80% d’Embraer par Boeing (au prix de 4,75 milliards de dollars) reviendrait à priver le marché de l’aéronautique civile de son numéro trois mondial, l’avionneur brésilien, sans que des concurrents potentiels chinois, japonais ou russe soient en mesure de combler cette absence avant une dizaine d’années en raison de barrières à l’entrée élevées, a expliqué l’exécutif européen dans un communiqué. La Commission prévoyait initialement de rendre une décision d’ici au 20 février 2020 sur cette transaction.

En octobre dernier, Boeing et Embraer avaient affirmé que leur projet demeurait « soumis à une approbation réglementaire » mais avait déjà fait l’objet d’une « évaluation positive » des autorités américaines. Les deux groupes se sont engagés par ailleurs à participer aux investigations de l’Union européenne. On remarquera que les auditions du CEO de Boeing au Congrès n’ont inclus aucune question sur le sujet du rachat d’Embraer, la politique locale préférant se concentrer sur la menace chinoise représentée par COMAC.

Depuis que le partenariat a été approuvé par les actionnaires d’Embraer en février dernier, les deux sociétés ont mis en œuvre « un processus de planification méthodique » pour créer une coentreprise regroupant les activités commerciales (avions et services) d’Embraer, qui sera rebaptisée Boeing Brasil. Leur portefeuille commun comprendra des avions de 70 à plus de 450 sièges, et inclura des appareils pour le transport de fret. Boeing détiendra 80% de la nouvelle société, Embraer détenant les 20% restants ; la coentreprise dédiée à l’aviation commerciale sera conduite par une équipe dirigeante basée au Brésil, avec à sa tête un président et un directeur général, la nouvelle entité étant directement rattachée au CEO de Boeing Dennis Muilenburg.

Boeing et Embraer préparent par ailleurs le lancement d’une coentreprise qui aura pour mission de promouvoir et développer les marchés visés par l’avion brésilien de transport militaire multimissions de taille moyenne KC-390. Selon les termes du partenariat proposé, Embraer détiendra une participation de 51% dans cette coentreprise, et Boeing les 49% restants. Ce programme a récemment franchi deux étapes clés : d’une part, le premier exemplaire du KC-390 a été livré début septembre à la force aérienne brésilienne ; d’autre part, cet avion multimissions a enregistré la première commande de la part d’un client étranger, à savoir le Portugal. Concrétisé par ces deux joint-ventures, ce partenariat stratégique de grande envergure permettra à Boeing et Embraer « d’assoir leur compétitivité sur le marché mondial, d’apporter davantage de valeur à leurs clients, et de stimuler l’industrie aéronautique brésilienne dans son ensemble ».

Coup de frein européen au deal Boeing – Embraer 1 Air Journal

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