La Haute Cour de Londres a donné raison à Airbus dans l’annulation de la commande de 50 A321neo par la compagnie aérienne Qatar Airways, un premier jugement dans la longue rivalité les opposant à propos des « problèmes de peinture » des A350.

La Haute Cour a autorisé le 26 avril 2022 l’avionneur européen à livrer à d’autres clients les A321neo assemblés pour la compagnie aérienne qatarie, une commande passée en 2017 pour des livraisons à partir de l’année prochaine, et annulée en janvier dernier dans le cadre du conflit sur les A350. Qatar Airways avait obtenu un mois plus tard la suspension de cette résiliation, afin de conserver les créneaux de livraison en cas de règlement du conflit, mais le jugement de mardi lui a finalement donné tort.

La Haute Cour a notamment mentionné la clause “cross default” prévue dans le contrat, autorisant l’annulation car Qatar Airways n’avait pas respecté d’autres engagements en refusant de prendre livraison de trois A350. Le jugement souligne en outre que la compagnie aérienne dispose d’alternatives aux A321neo (dont 10 en version LR), dont les Boeing 737 MAX 10 pour lesquels elle avait signé un protocole d’accord début février. 

Airbus a déclaré dans un communiqué être satisfait de la décision de la Cour qui « reconnaît sa position selon laquelle une coopération transparente et confiante est essentielle dans notre industrie ». Et que ce problème « soit désormais derrière lui et que nous puissions maintenant nous concentrer sur le principal sujet de la fausse déclaration par Qatar Airways sur la sécurité et la navigabilité de l’A350 », a-t-il ajouté. On notera que le jugement d’hier ne porte pas sur l’annulation du contrat des A321neo, laissant la porte ouverte à des demandes de compensation de la part de Qatar Airways ; cette dernière n’a pas officiellement réagi.

Il ne s’agit cependant que du premier round dans la bataille judiciaire opposant Airbus à la compagnie de l’alliance Oneworld à propos des défauts de surface constatés sur des A350. Elle a cloué au sol 23 A350-900 et A350-1000 depuis aout dernier, sur ordre du régulateur qatari, allant jusqu’à évoquer des risques d’incendie. Trente autres ont été livrés, seuls 19 -1000 figurant encore fin mars dans les carnets de commandes d’Airbus. Rappelons que Qatar Airways a demandé à l’avionneur 618 millions de dollars de dommages et intérêts pour l’immobilisation au sol des 23 appareils, plus 4 millions par jour d’immobilisation supplémentaire ; le total réclamé dépasserait désormais le milliard de dollars

Airbus a rejeté toutes les accusations de Qatar Airways, déclarant qu’il n’y a « aucune base raisonnable ou rationnelle » à l’interdiction de vol ; au contraire, la compagnie aérienne aurait « cherché à organiser ou a acquiescé » à la décision d’immobiliser les avions parce qu’il était dans son intérêt économique de le faire « compte tenu de l’impact de la pandémie de coronavirus ». Airbus affirme toujours que les défauts de peinture ne sont qu’un « problème cosmétique » ne justifiant ni l’immobilisation des A350, ni le refus de livraisons. Le régulateur européen EASA n’a pas jugé la dégradation des surfaces de l’A350 comme une menace pour la sécurité des vols, son homologue qatari restant le seul au monde à avoir pris la mesure. 

D’autres clients des A350 ont pourtant constaté le problème, par exemple Finnair dès 2016, suivie depuis par Cathay Pacific, Etihad Airways, Lufthansa et Air France (dans le cadre de la maintenance des avions d’Air Caraïbes), ou plus récemment British Airways et Iberia. La compagnie allemande aurait en particulier renvoyé trois A350 pour être repeints, gratuitement dans le cadre de la garantie ; mais aucun opérateur autre que Qatar Airways n’a cloué au sol les A350 affectés.

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