Deux nouveaux monocouloirs font face à des problèmes avec les autorités de certification, l’Airbus A321XLR d’une part et le Boeing 737 MAX 10 de l’autre, mais l’EASA a pour la première fois confirmé que les problèmes de « peinture » de l’A350 ne posent pas de risque de sécurité.

Alors que l’A321XLR vient d’opérer son premier vol, « avec succès » selon l’avionneur européen, son entrée en service a déjà été retardée de fin 2023 à « début 2024 afin de satisfaire aux exigences de certification », avait confirmé Airbus dès le début du mois dernier. L’EASA (Agence européenne pour la sécurité aérienne) a notamment des questions sur les risques d’incendie liées au réservoir de carburant supplémentaire (RTC) moulé dans l’arrière du fuselage, notamment en cas d’atterrissage sur le ventre. Un réservoir nécessaire pour offrir le rayon d’action « extra-long » de l’A321XLR, mais qui devrait donc subir des modifications afin de protéger la cabine ; et c’est l’ampleur de ces modifications qui fait l’objet de discussions entre Airbus et le régulateur. Aucune date n’est donc avancée pour la certification.

Une des solutions étudiées par Airbus serait de porter la MTOW à 101,7 tonnes contre 101 actuellement. L’avionneur « discute des exigences de certification avec l’EASA », déclarait en mai à l’agence Bloomberg le porte-parole d’Airbus Stefan Schaffrath. « Nous laissons les autorités indépendantes prendre tout le temps nécessaire pour prendre une décision, et nous écouterons attentivement toutes les exigences si elles se présentent ». L’agence européenne a de son côté expliqué que « l’ensemble complet des conditions relatives à l’installation des réservoirs centraux arrière est encore en cours de définition ».

Régulateurs : dur pour l’A321XLR et le 737 MAX 10, pas pour l’A350 1 Air Journal

©Sylvain Ramadier-Airbus

La FAA américaine a elle aussi proposé des « conditions spéciales » pour le monocouloir européen, après avoir été avertie du risque potentiel par… Boeing, qui de son côté fait face à de sérieux problèmes avec son 737 MAX 10 : le plus grand modèle de la famille MAX doit être certifié d’ici la fin de l’année – sous peine de recommencer la campagne à zéro. L’avionneur expliquait mercredi « faire des progrès » avec le régulateur, mais refusait comme son rival d’avancer une date précise pour la certification. Car si cette dernière n’est pas accordée dans les temps, il sera obligé de modifier le cockpit du MAX 10 pour y installer le système d’alerte EICAS (présent dans tous les Boeing sauf la famille 737). Avec à la clé des conséquences financières pour les compagnies aériennes qui ont commandé ce modèle, en raison de nouvelles exigences de formation (et de la différenciation avec les autres MAX). Une loi passée par le Congrès américain après les deux crashes de MAX 8 oblige tous les nouveaux avions certifiés à partir de début 2023 à être équipé d’un système d’alerte ; mais il peut encore accorder une dérogation à Boeing, y compris pour le 737 MAX 7.

Mike Fleming, vice-président senior de Boeing Commercial Airplanes, confirmait cette semaine qu’il faut « plus de temps pour obtenir l’approbation de nos documents que par le passé », la FAA ayant été sérieusement remise en question après avoir certifié le MAX 8 en ayant confié une partie des examens au constructeur. « Les régulateurs contrôlent le calendrier et il incombe à Boeing de respecter le plan de certification », a-t-il ajouté, citant comme exemple de changement la reprise en charge par la FAA de la certification des évaluations de sécurité (qui traitent de la façon dont les pilotes interagissent avec les systèmes, les « facteurs humains »).

Le mois dernier déjà, le régulateur prévenait Boeing que la certification du MAX 10 avant la fin 2022 était « compromise », lui demandant de fournir un « calendrier de certification mature ». Des sources de Reuters estiment qu’il n’est « pas certain » que le constructeur ait suffisamment de temps pour obtenir l’approbation d’ici décembre.

En revanche l’EASA a pour la première fois officialisé sa position dans le très public conflit opposant Airbus à la compagnie aérienne Qatar Airways à propos des défauts de surface de la famille A350. « Nous avons inspecté l’avion. Nous n’avons vu aucun dommage qui pourrait impliquer des problèmes de sécurité », a déclaré le directeur exécutif du régulateur Patrick Ky lors d’une conférence sur la sécurité aérienne à Washington. Jusque là, la compagnie citait un ordre du régulateur qatari pour justifier l’immobilisation au sol de plus de 25 A350-900 et -1000, et son refus de prendre livraison de nouveaux avions ; le problème représente selon elle un risque notamment en cas d’impact de foudre. Airbus de son côté citait l’absence de directive de tous les autres régulateurs, y compris l’EASA ou la FAA, pour parler de problème « cosmétique ». D’autres compagnies ayant constaté le même problème continuent à opérer leurs A350 après réparation.

Le sujet pourrait bien provoquer quelques étincelles supplémentaires entre le 19 et le 20 juin, quand le dirigeant d’Airbus Guillaume Faury assistera à l’assemblée générale de l’IATA qui se tient cette année justement à Doha, avec le dirigeant du groupe Qatar Airways Akbar Al Baker en maître de cérémonie…

Régulateurs : dur pour l’A321XLR et le 737 MAX 10, pas pour l’A350 2 Air Journal

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